Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 6 février 2008 à 15h00
Libertés et responsabilités locales — Adoption des conclusions du rapport d'une commission tendant à ne pas adopter une proposition de loi

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Le dernier débat budgétaire a vu resurgir cette question, sous l'impulsion de mon groupe, qui a déposé des amendements en ce sens. À chaque fois, une fin de non-recevoir nous a été opposée, par le biais d'arguments techniques destinés, en fait, à esquiver la discussion. Je me réjouis donc aujourd'hui de la tenue de ce débat.

Car chacun sait bien ici que rien n'est réglé, la situation des communes étant en effet très complexe. M. Arthuis l'a d'ailleurs souligné, en considérant que ce dispositif « impose une double peine aux communes vertueuses ».

Comment, en effet, justifier auprès des communes cette dépense imposée ? Je pense notamment aux communes rurales ou à petit budget, qui font des efforts pour maintenir sur leur territoire une école publique, afin d'assurer la scolarisation de tous les enfants. Comment, dès lors, prévoir des investissements à plus long terme ?

L'argument financier n'est effectivement pas négligeable : des associations ont estimé que cette mesure pourrait coûter de 132 à 400 millions d'euros aux communes, en fonction du montant du forfait communal par élève et du nombre d'élèves concernés.

Ce surcoût est préjudiciable à l'école publique. L'article 89 constitue ainsi un verrou supplémentaire à la création d'écoles publiques et risque donc finalement de mettre en danger le maintien et le développement de l'enseignement public.

Il faut rappeler une réalité : en France, 12 000 communes ne disposent plus d'école communale et 28 % des écoles ont deux classes au plus. Nous savons par ailleurs que la situation ne va pas en s'arrangeant.

L'école privée sous contrat scolarise plus de 2 millions d'élèves, soit un élève sur six. Les établissements qu'elle regroupe sont confessionnels pour 90 % d'entre eux. Rappelons qu'elle dispose déjà de moyens importants, avec un personnel enseignant formé et payé par l'État. Elle n'est cependant pas soumise aux mêmes obligations que l'école publique, qui garantit seule la proximité avec la population, la non-sélection des élèves, le respect des principes de neutralité, de gratuité et de laïcité.

Au demeurant, l'article 89 - c'est une autre source d'inquiétude - n'est pas sans incidence sur les prérogatives du maire.

Si des parents veulent scolariser leur enfant dans une école publique située hors de leur commune, ils doivent obtenir l'accord préalable du maire, faute de quoi la commune de résidence n'aura pas à payer de contribution.

À l'inverse, aucune demande de dérogation auprès du maire n'est nécessaire si les parents veulent scolariser leur enfant dans une école privée située hors de leur commune. Dans ce cas, le maire est contraint de payer.

Or, je le rappelle, toute dépense doit résulter d'une délibération en conseil municipal. Avec le dispositif que je viens d'évoquer, la dépense est imposée au maire a posteriori. C'est, de fait, une perte de contrôle de la gestion de la dépense communale, ce qui est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales fixé par l'article 72-2 de la Constitution.

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