L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) possède désormais un recul de vingt-cinq ans sur les données de consommation de drogue et les addictions dans notre pays, mais aussi au niveau européen, puisque nous participons au Réseau européen d'information sur les drogues et les toxicomanies (Reitox). D'ailleurs, l'OFDT rend aujourd'hui même son rapport public annuel sur les drogues au sein de l'Union européenne.
Je n'ai pas aujourd'hui de chiffres nouveaux à vous communiquer, mais il est impossible en revanche de ne pas tenir compte de l'impact de la crise sanitaire sur la santé physique et mentale de nos concitoyens, et donc, aussi, sur les addictions.
Il faut distinguer à cet égard les effets du premier confinement, avec une mise à l'arrêt complète de notre société, mais pendant un temps limité, et les mesures prises depuis un an, qui ont permis de conserver une vie sociale limitée. Cette seconde période aura sans doute des effets plus durables sur nos modes de vie, lesquels ne pourront être mesurés que dans quelques années.
Aujourd'hui, les différents instituts de sondage mènent de nombreuses enquêtes : elles fournissent un état des lieux à l'instant t, mais ne permettent pas de faire des comparaisons sérieuses avec les études précédentes, faute d'identité des méthodes employées.
De même, Santé publique France publie chaque année un baromètre santé, réalisé à partir de plus de 20 000 appels téléphoniques, qui contient les données de consommation chez les adultes. La réalisation de celui de 2020 a toutefois été impactée par la crise et les données qu'il contient ne peuvent donc pas être strictement comparées à celles des années précédentes.
Notre brochure intitulée Drogues, Chiffres clés rappelle les grandes tendances et les niveaux d'usage dans notre pays. Un graphique récemment publié dans la revue Psychotropes dédiée aux 25 ans de l'OFDT retrace également les grandes évolutions des consommations de tabac, d'alcool et de cannabis depuis un quart de siècle.
Entre le début des années 1990 et aujourd'hui, le niveau de consommation quotidienne d'alcool a été divisé par 2,5 : 24 % des adultes en consommaient quotidiennement, contre un peu plus de 10 % aujourd'hui, un chiffre stable depuis dix ans. Les niveaux de consommation réguliers restent toutefois importants : 87 % des adultes en consomment régulièrement, et 40 % tous les mois.
Ce graphique montre aussi clairement les effets des politiques menées depuis trente ans pour lutter contre le tabagisme. Ces derniers sont particulièrement marqués au cours des cinq dernières années, grâce à une politique globale portant sur le prix, le marketing - paquet neutre -, l'accès généralisé aux traitements de substitution nicotinique et l'interdiction de consommer dans les lieux publics intérieurs et de vendre aux mineurs. Un adulte sur quatre continue de fumer quotidiennement, ce qui reste un niveau élevé par rapport à nos voisins européens, mais l'accès au tabac chez les jeunes est en forte baisse. On a toutefois remarqué, lors du premier semestre 2020, une légère augmentation du niveau de consommation quotidienne de tabac.
Le cannabis connaît une diffusion très large depuis vingt ans. Un adulte sur deux a déjà expérimenté cette drogue, contre 12 % il y a vingt-cinq ans. Le niveau de consommation chez les adolescents est plutôt en baisse sur la période, même s'il reste élevé. En revanche, les adultes de 18 à 45 ans consomment davantage que leurs aînés : ils sont 11 % à le faire, contre 4 % voilà vingt-cinq ans. Soulignons par ailleurs que les produits consommés aujourd'hui sont plus fortement dosés en tétrahydrocannabinol (THC) que ceux qui étaient disponibles au début des années 1990.