Je souhaiterais avant tout remercier l'ensemble de mes collègues membres de ce groupe de travail commun à nos deux commissions. Ce format nous a permis d'aboutir à des propositions fortes, mais néanmoins consensuelles. Cette expérience de travail en commun me paraît intéressante et pourrait être reproduite pour des sujets d'intérêt commun pour nos deux commissions.
Je me réjouis d'autant plus de cet aboutissement que ce sujet de l'alimentation durable et locale est redevenu une priorité avec la crise sanitaire : nous avions émis l'idée de nous y intéresser dès le premier confinement du mois de mars 2020 lié à l'épidémie de la Covid-19, avec Nelly Tocqueville.
Au total, le groupe de travail a procédé à une petite trentaine d'auditions, entre avril 2020 et mars 2021.
Le rapport que nous examinons constitue une synthèse de cette matière issue des auditions mais aussi le fruit d'échanges approfondis entre rapporteurs. Nos propositions reposent sur plusieurs convictions et je souhaite souligner les notions de « durabilité » et de « localisme », qui renvoient aux pratiques visant à nous nourrir avec des produits sûrs et de qualité, accessibles en proximité et économiquement, rémunérateurs pour le producteur, en quantité suffisante et dans le respect de l'environnement, créant des opportunités à saisir pour retisser du lien social dans tous les territoires, redynamiser le tissu commercial des petites et moyennes villes et relancer un cycle d'aménagement du territoire au service de nos besoins primaires.
La situation actuelle de notre agriculture repose sur un paradoxe : le modèle agricole français est sans doute le plus durable au monde, selon plusieurs classements internationaux, mais nous avons tout de même des progrès à accomplir. Il est important de rappeler la très haute qualité de notre modèle, notamment par rapport à nos concurrents, en termes d'utilisation des ressources terrestres, d'émissions de gaz à effet de serre, de consommations d'engrais et de pesticides ou encore de gaspillage alimentaire.
La crise sanitaire a mis en lumière certaines vulnérabilités dans nos systèmes alimentaires et permis de rappeler l'importance de l'objectif de « résilience ». Cette question de la résilience rejoint celle de la durabilité qui ne peut s'apprécier qu'au croisement des problématiques économiques, environnementales et sociales.
Plusieurs propositions de notre rapport s'inscrivent dans ces objectifs de renforcer la dimension territoriale de notre politique alimentaire, en corrigeant certaines de ses faiblesses tout en consolidant ses forces. Je pense au renforcement de la diversité des cultures, à la nécessité de protéger les pratiques trompeuses en définissant mieux les produits locaux, ce qui accompagnera, au reste, leur essor, à la nécessité de donner aux collectivités territoriales une véritable capacité d'action et des moyens pérennes pour structurer et soutenir les filières agricoles et les industries de transformation locales, ce qui mériterait, à mon sens personnel, d'engager une réflexion pour envisager la création d'un statut « d'autorités organisatrices de l'alimentation » dans les territoires, avec des modalités de dévolution souples et adaptatives de cette compétence sur le modèle de ce qu'a prévu le législateur dans le domaine des transports avec la loi d'orientation des mobilités. Je pense au cadre juridique des projets alimentaires territoriaux (PAT), qui devrait être renforcé, à la poursuite de la lutte contre le gaspillage alimentaire et à l'impérieuse nécessité de faire naître un véritable affichage sur l'origine des produits, qui compléterait utilement l'affichage environnemental prévu par le projet de loi « Climat et résilience ».
Un autre point est essentiel : nous devons renforcer la transparence nationale et locale sur les circuits alimentaires en permettant aux collectivités territoriales d'imposer aux acteurs économiques la transmission d'informations utiles pour la définition de leur politique alimentaire, dans le respect du secret des affaires.
Le levier du foncier est également déterminant et nous devons avancer sur le chemin d'une évolution du cadre législatif pour mieux inciter la transmission des exploitations à de jeunes agriculteurs. Plusieurs initiatives ont été lancées, notamment via des propositions de loi.