Intervention de Hervé Gillé

Commission des affaires économiques — Réunion du 19 mai 2021 à 11h30
Évaluation de la loi n° 2000-1208 du 3 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains — Présentation du rapport d'information

Photo de Hervé GilléHervé Gillé :

Je souhaiterais tout d'abord m'associer aux mots du président Longeot à l'attention de Mme Nelly Tocqueville, qui a entamé ces travaux. Mon intervention se concentre sur la dimension territoriale de notre politique alimentaire qui, de l'avis de l'ensemble des acteurs et organismes que nous avons consultés, gagnerait à être renforcée à travers une meilleure association des collectivités et par un recours accru à des leviers existants et facilement mobilisables : les projets alimentaires territoriaux et la commande publique.

La définition de la politique alimentaire repose principalement sur le Gouvernement, même si les régions sont mobilisées dans le cadre de l'attribution des fonds européens et que les départements ont développé leurs actions sur ce volet. En 2014, la « déclaration de Rennes » de l'association des régions de France avait marqué cette préoccupation avec force. Toujours en 2014, la création des projets alimentaires territoriaux (PAT) par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a enclenché une dynamique de territorialisation, que notre rapport appelle à soutenir et à amplifier.

À ce jour, il existerait plus de 200 PAT et 80 % des départements comptent au moins 1 PAT accompagné par l'État. La dynamique est enclenchée. Je rappellerai les deux objectifs qui avaient été fixés par l'État en 2016 : un PAT par département à fin 2017 et 500 PAT en 2020. Nous avons pris du retard sur cet objectif.

Nous formulons donc plusieurs remarques et propositions. Les PAT ne doivent surtout pas être réduits à la seule dimension « transition agroenvironnementale ». S'ils doivent y contribuer, il s'agit auparavant de contribuer à la structuration des filières locales de production, de transformation et de distribution, pour permettre une bonne valorisation des produits locaux, dans un double objectif de qualité et de compétitivité.

Nous nous sommes interrogés sur le fait de rendre obligatoire l'établissement d'un PAT par un niveau de collectivités. Nous pensons que le dispositif doit, du moins à ce stade, garder de la souplesse. Aujourd'hui, l'initiative de création d'un PAT peut être prise par tous les acteurs publics et privés concernés. Il nous paraît important de préserver cette ouverture, tout en fixant des objectifs de coordination et de maillage du territoire, afin d'éviter à terme des « zones blanches » de la politique alimentaire territoriale. À cet égard, il est important de ne pas polariser le dispositif des PAT sur les seules métropoles, sous peine d'aggraver nos fractures territoriales : les PAT doivent être un instrument de cohésion et d'équilibre territorial et non de subordination de la campagne à la ville.

Nous pensons donc que le déploiement des PAT doit être soutenu et nous proposons de mieux coordonner les initiatives territoriales dans un cadre qui reste à définir, mais qui doit demeurer souple. Nous pensons également qu'il est nécessaire d'assurer un financement d'au moins 80 millions d'euros par an pendant cinq ans, sur le modèle de ce que prévoit le plan de relance, et enfin de donner des moyens au réseau national des PAT pour accompagner ce déploiement. Ce réseau, qui existe déjà et est animé par Terres en villes, les chambres d'agriculture, des personnalités qualifiées et des élus, pourrait évoluer en Observatoire.

Dans le cadre de l'examen du projet de loi « 4 D », il faudra également envisager de renforcer l'articulation entre le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) et les plans régionaux d'agriculture durable (PRAD).

En outre, nous pensons que les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE), dont le cadre sera précisé par le projet de loi 4 D, devront s'articuler avec les projets alimentaires territoriaux dans leurs composantes dédiées à l'autonomie alimentaire, à la transition et à la compétitivité agroenvironnementale.

Je terminerai en évoquant les leviers à mobiliser, pour permettre à nos collectivités territoriales de se saisir encore davantage de cette politique. Nous proposons une évolution du code des marchés publics pour sécuriser nos approvisionnements en produits locaux, évolution consistant à porter le seuil de passation des marchés de gré à gré à 80 000 euros et à permettre aux produits agricoles et alimentaires acquis dans le cadre d'un PAT de satisfaire aux objectifs posés par la loi EGALIM et bientôt par la loi « Climat et résilience » pour les approvisionnements de la restauration collective. Nous proposons enfin d'acter le transfert vers les conseils départementaux et régionaux de l'autorité sur les adjoints gestionnaires en charge de la restauration collective de l'État pour les collèges et les lycées, en cohérence avec la demande des collectivités.

Nous rappelons également la nécessité d'accompagner les acheteurs publics par des outils pratiques comme des guides et des formations et moyens financiers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion