Madame présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre groupe s’associe aux félicitations qui ont été exprimées et votera bien entendu ce texte.
Aujourd’hui, les bibliothèques publiques sont le premier équipement culturel de France : notre pays compte 16 500 établissements, pour 12 millions d’usagers. Le rapport Orsenna-Corbin de 2018, qui a déjà été cité, montrait que 40 % des Français fréquentaient une bibliothèque au moins une fois par an, mais que seuls 50 % d’entre eux y empruntaient un livre. Cela témoigne de la diversification des activités des bibliothèques et de l’évolution des usages.
Étant jeune, je me rappelle avoir fréquenté la bibliothèque Faidherbe, dans le XIe arrondissement de Paris ; j’y écoutais les contes qui étaient lus aux enfants pour leur faire découvrir la lecture. Aujourd’hui, c’est parfois un accueil, du café, du wifi ou des lectures publiques que l’on va chercher dans les bibliothèques… Bref, ces dernières sont indispensables.
J’observe une extraordinaire adhésion des Français aux bibliothèques, mais aucune définition de ces dernières n’existe, ni aucune loi-cadre. Ce texte est donc tout à fait bienvenu.
Trois acteurs décentralisés sont impliqués – les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, et les départements –, sans que leur rôle soit précisé. Peut-être faudra-t-il demain aller plus loin et inscrire les bibliothèques parmi les compétences obligatoires des départements ?
Un consensus a émergé. Je remercie le Gouvernement d’avoir décidé de la procédure accélérée et la commission d’avoir voté ce texte à l’unanimité. Ce consensus rejoint d’ailleurs celui qui prévalait hier sur les librairies indépendantes. Je n’y vois pas qu’une simple coïncidence de date : le livre rassemble et bibliothèques sont le lieu du lien, aussi bien entre les personnes qu’entre le passé et l’avenir.
Dans À la Recherche du temps perdu, Marcel Proust écrit : « C’est grâce à cet oubli seul que nous pouvons de temps à autre retrouver l’être que nous fûmes […] Au grand jour de la mémoire habituelle, les images du passé pâlissent peu à peu, s’effacent, il ne reste plus rien d’elles, nous ne le retrouverons plus. Ou plutôt nous ne le retrouverions plus, si quelques mots […] n’avaient été soigneusement enfermés dans l’oubli, de même qu’on dépose à la Bibliothèque nationale un exemplaire d’un livre qui sans cela risquerait de devenir introuvable. »
Nos bibliothèques publiques sont donc bien les gardiennes de la mémoire, mais aussi le lieu du lien. Elles ont un rôle patrimonial et d’actualité ; elles sont des lieux à la fois de vie, d’échange et de mémoire, et c’est en cela qu’elles sont extrêmement importantes. Cette proposition de loi acte intelligemment l’évolution de leurs usages et accompagne leur mutation. C’est pourquoi nous la voterons.
Comment ne pas citer Le Nom de la Rose et ne pas penser au bibliothécaire aveugle, Jorge de Burgos, dont le nom évoque Borges ? L’action du roman se passe dans un monastère, mais la bibliothèque y joue un rôle central. Umberto Eco y écrit : « La bibliothèque se défend toute seule. Insondable comme la vérité qu’elle héberge, trompeuse comme le mensonge qu’elle conserve. Labyrinthe spirituel, c’est aussi un labyrinthe terrestre. »
Mes chers collègues, entrons dans le labyrinthe pour mieux en sortir !
Le 24/06/2021 à 12:02, aristide a dit :
"J’observe une extraordinaire adhésion des Français aux bibliothèques, mais aucune définition de ces dernières n’existe, ni aucune loi-cadre. Ce texte est donc tout à fait bienvenu."
Pourquoi toujours légiférer sur tout ?
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