Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 8 juin 2021 à 14h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 24 et 25 juin 2021

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que notre pays, comme l’ensemble des États membres de l’Union européenne, retrouve un peu d’oxygène en ouvrant progressivement ses lieux publics et ses frontières, la relance économique européenne constituera un sujet majeur à l’ordre du jour du Conseil européen des 24 et 25 juin prochain. Les prévisions de croissance présentées le mois dernier par la Commission européenne permettent d’espérer voir enfin le bout du tunnel : la croissance au sein de l’Union s’élèverait à 4, 2 % en 2021 et à 4, 4 % en 2022, même si elle reste largement conditionnée par l’amélioration durable des conditions sanitaires.

Dans cette perspective, le rendez-vous des vingt-sept États membres permettra de faire le point sur la mise en œuvre de la facilité pour la reprise et la résilience, qui constitue la pièce maîtresse du plan de relance européen. Le suivi du déploiement de celui-ci fait d’ailleurs l’objet d’une attention particulière de notre commission, avec notre collègue Jean-Marie Mizzon, qui conduit des auditions sur le sujet.

La première étape incontournable de cette mise en œuvre était la ratification de la décision « ressources propres » par l’ensemble des États membres, selon leurs règles constitutionnelles propres. Après bien des craintes résultant de blocages, notamment en Hongrie, en Autriche et aux Pays-Bas, cette première étape a été franchie, et la décision « ressources propres » est entrée en vigueur le 1er juin.

Le délai de ratification nécessaire pour une mise en œuvre à temps de la relance européenne a été respecté. Cela n’avait rien d’évident, comme nous l’avions souligné lors du dernier débat préalable à la réunion du Conseil européen. Désormais, les premiers préfinancements au titre de la facilité pour la reprise et la résilience pourront être versés aux États membres qui ont transmis leur programme national correspondant, soit presque un an après que l’ensemble des États membres a trouvé un accord, en juillet dernier, sur les contours de ce plan de relance européen.

Monsieur le secrétaire d’État, lors du dernier débat préalable à la réunion du Conseil européen, je vous avais interrogé sur le dimensionnement de ce plan de relance, alors que la crise sanitaire durait depuis plus longtemps qu’initialement anticipé. Sur ce point, le commissaire européen à l’économie, Paolo Gentiloni, a reconnu dans la presse que ce plan pourrait ne pas être suffisant et qu’il faudrait revoir les règles budgétaires européennes avant d’aller plus loin. Estimez-vous également que ce plan de relance doive être complété ? Dans l’affirmative, quel calendrier la France pousse-t-elle pour la révision du cadre budgétaire européen, alors que l’année 2023 est désormais évoquée pour aboutir à des conclusions ? Si l’on considère qu’un renforcement du plan de relance européen est nécessaire, alors cet horizon apparaît bien tardif.

En outre, les progrès accomplis dans la mise en œuvre du plan de relance européen n’épuisent pas la question de son remboursement, sur laquelle nous avions mis en garde le Gouvernement lors de l’examen du projet de loi autorisant la ratification de la décision « ressources propres ». En effet, à défaut de nouvelles ressources propres, ce remboursement reposera uniquement sur les contributions nationales, soit une hausse de 2, 5 milliards d’euros par an pour la France, à compter de 2028.

À cet égard, le prochain Conseil européen se tiendra peu de temps avant la présentation par la Commission européenne de ses propositions de nouvelles ressources propres, au nombre de trois : une redevance numérique, un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, le système d’échange des quotas d’émission carbone.

S’agissant de la redevance numérique, la proposition européenne va intervenir alors que les ministres des finances du G7 ont tout juste trouvé un accord sur la réforme de la fiscalité internationale des entreprises, y compris sur la taxation des activités numériques. Comment la proposition de la Commission européenne s’articulera-t-elle avec cet accord ? Estimez-vous que la dynamique impulsée par le G7 puisse être réellement suivie par les vingt-sept États membres, compte tenu des réticences de longue date de certains d’entre eux ?

Sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, il nous faudra être particulièrement attentifs aux effets potentiels de ce dispositif sur nos propres entreprises importatrices de certaines matières premières. De même, pour la ressource fondée sur le système d’échange des quotas d’émission carbone, un équilibre délicat doit être trouvé dans la définition des secteurs visés, afin de satisfaire un objectif de rendement budgétaire et une incitation écologique sans peser excessivement sur nos entreprises et emplois européens.

Monsieur le secrétaire d’État, quels secteurs d’activités la France souhaite-t-elle voir intégrés dans le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ?

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