Intervention de Julien Bargeton

Réunion du 8 juin 2021 à 14h30
Amélioration de l'économie du livre — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Julien BargetonJulien Bargeton :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans son récent Petit Traité du lecteur, le libraire écossais Shaun Bythell dresse une typologie des lecteurs. Inversement, en France, les lecteurs pourraient dresser une typologie des libraires. En effet, grâce à la loi relative au prix du livre, nous avons maintenu notre réseau. Pour autant, nos 3 300 librairies indépendantes ont vu leur part de marché baisser de près de 3 points entre 2006 et 2019. Une part croissante des achats de livres se fait désormais sur internet : celle-ci est passée de 2, 2 % en 2002 à 22 %, soit une multiplication par dix en vingt ans.

La pandémie a certes fait reculer le chiffre d’affaires des librairies de 3, 3 %, mais il s’agit d’une baisse modérée. À cet égard, soulignons le soutien sans précédent du Gouvernement et le plébiscite des Français en faveur de la réouverture de leurs librairies.

Ces chiffres témoignent du bouleversement de l’économie du livre, notamment avec l’avènement du numérique.

Un autre ouvrage récent que je vous invite à regarder est Histoire du livre et de l ’ édition de Yann Sordet, qui est directeur de la bibliothèque Mazarine. Ce livre explique les différentes mutations de l’économie du livre à travers les siècles, du codex jusqu’au livre numérique. C’est un ouvrage extrêmement intéressant, qui montre bien que ce secteur a toujours connu des bouleversements, notamment la grande séparation des métiers lors de la fin du libraire éditeur.

La dernière réforme d’ampleur – elle concernait le livre numérique – date de 2011. On le voit bien, il était temps de légiférer, car les grandes plateformes contournent la loi. En effet, s’il est interdit d’expédier gratuitement des livres depuis la loi du 8 juillet 2014, les géants s’en accommodent en pratiquant des tarifs de livraison d’environ 1 centime d’euro. Bien évidemment, cette situation n’est pas viable pour les libraires, pour lesquels un envoi revient à peu près à 6, 50 euros. Il y a donc là une très forte distorsion de concurrence. C’est la raison pour laquelle mon groupe soutient l’instauration d’un prix plancher. Levant très vite le suspens, je vous annonce que nous voterons ce texte.

Un consensus s’est dessiné autour de la nécessité de protéger les librairies indépendantes. Le 21 mai dernier, le Président de la République a d’ailleurs formulé le souhait d’un prix réellement unique pour tous les livres, qu’ils soient achetés en librairie ou livrés.

Le Gouvernement a enclenché la procédure accélérée sur ce texte, dont Laure Darcos, que je salue, a pris l’initiative. Cette proposition de loi a également fait l’objet d’une saisine du Conseil d’État par le président du Sénat, que je tiens aussi à saluer. Enfin, le syndicat de la librairie française, qui regroupe plus de 600 personnes, est très favorable à ces dispositions.

Finalement, le consensus a gagné la commission des affaires économiques du Sénat. Je tiens également à saluer le fait qu’elle ait renoncé à déposer son amendement de suppression. Dans le cas contraire, nous aurions eu l’impression étrange et gênante que les deux hémisphères d’une même majorité ne se parlaient pas.

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