Le débat que nous avons eu dans cet hémicycle sur le plan de relance, cet automne, a bien montré les limites de notre rôle. C’était uniquement parce que des crédits très importants étaient inscrits au sein de la mission « Plan de relance » que, d’une manière exceptionnelle, nous avons pu faire preuve d’initiative.
Mais, même dans ce cadre, nous ne sommes pas vraiment parvenus à faire bouger les choses… L’étude du plan de relance a certes permis la tenue de débats de fond sur les moyens mis en œuvre pour sortir de la crise, mais, à montant égal de crédits budgétaires, cela n’a pu avoir de conséquences réelles sur la mission adoptée, même au Sénat.
J’en viens maintenant à l’accès à l’information. L’ennemi de l’analyse et de la décision politiques n’est pas le manque d’informations mais, en l’occurrence, le trop-plein d’informations.
La proposition de loi organique présentée à l’Assemblée nationale par Laurent Saint-Martin et Éric Woerth, relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, dresse le même constat. Les milliers de pages que constituent le projet de loi, les rapports budgétaires, les jaunes, bleus, oranges et autres questionnaires budgétaires rendent parfois difficile la vision politique pour les parlementaires, sans parler de la transparence et de l’accès à l’information pour les citoyens. Mais les propositions formulées ne sont pas suffisantes, car elles restent très techniques, là où l’enjeu est politique.
Quant au rapport Arthuis, il recommande d’appliquer des critères financiers très stricts que nous ne pouvons pas approuver, surtout dans le contexte actuel et au moment où le pacte de stabilité européen est suspendu. La tentation d’un pacte de stabilité français est réelle, mais le mettre en place serait un non-sens tant démocratique qu’économique ; le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ne pourrait que s’y opposer.
Nos débats déjà fort contraints doivent-ils l’être davantage, en ajoutant de nouvelles règles limitatives sur les déficits et la dette publique ? Pourquoi cette volonté, que l’on sent poindre jusqu’au sein du Gouvernement, de clore dès à présent le grand débat sur la dette publique, alors que, au contraire, le contexte économique et social nécessite de le prolonger et de l’approfondir, ainsi que de faire émerger de nouvelles solutions ?
Mes chers collègues, le débat qui nous anime aujourd’hui est propre à la Ve République et au parlementarisme rationalisé, mais il a pris encore plus d’acuité eu égard à la pratique constatée sous ce quinquennat. Si nous devons réduire un déficit, c’est bien le déficit démocratique de nos institutions, dans leur pratique actuelle. La crise que nous traversons, qui remet en cause notre modèle, et les échéances électorales de 2022 n’en sont-elles pas l’occasion ?