Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 10 juin 2021 à 15h15
Quelle portée de l'intervention du parlement dans l'élaboration du projet de loi de finances — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye :

Par ailleurs, nous ne dialoguons qu’insuffisamment avec le Gouvernement, monsieur le ministre. Ce n’est pas que vous ne veniez pas souvent au Sénat, mais les débats parlementaires comme celui qui nous réunit aujourd’hui ne nous permettent d’échanger qu’insuffisamment.

Il est également à regretter que nous soyons trop peu, voire très rarement suivis lorsque nous proposons des ajustements. Lorsque nos amendements sont adoptés, ils sont quasi systématiquement mis au pilon par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale. À de trop rares exceptions près, seuls des amendements de pure forme ou des aménagements purement techniques, donc marginaux, échappent à l’automatisme de cette sentence.

Conscients de la permanence de ce courroux, les sénateurs devraient plutôt profiter de l’examen du budget pour construire un véritable contre-budget, même si c’est difficile, au lieu de se bercer de l’illusion que leurs amendements pourraient finalement prospérer. Ce serait d’autant plus approprié que la Haute Assemblée est censée représenter la sagesse dans nos institutions. Nous serions fort avisés de proposer des budgets bien plus équilibrés, c’est-à-dire moins dépensiers et donc plus soutenables pour les contribuables.

Je tiens à rappeler ici qu’il n’existe pas plus d’argent magique qu’il n’existe d’argent public : il n’existe que l’argent des contribuables, que nous nous devons de gérer avec prudence et rigueur.

À ce manque d’informations s’ajoute aussi un manque d’échanges. Nous sommes chaque fois mis au pied du mur en découvrant, au début du mois de septembre, les premiers arbitrages par voie de presse. Ce fut le cas par exemple lors de la suppression de la taxe d’habitation. À propos, qu’a fait le Gouvernement des préconisations de notre groupe de travail sur la suppression de la taxe d’habitation ? Peu de choses…

Le Gouvernement serait pourtant parfois bien avisé de suivre nos conseils. La taxe dite carbone, élément déclencheur de la crise des « gilets jaunes », pour laquelle nous avions préalablement formulé des propositions d’apaisement, fut là pour le démontrer.

Nous manquons enfin cruellement de temps pour contrôler le budget. Chaque année, nous dénonçons le manque de temps concédé dans le calendrier à l’examen du projet de loi de règlement, qui correspond en réalité aux réalisations. Nous consacrons beaucoup de temps au budget, c’est-à-dire au virtuel, et pas beaucoup au réel…

Dans cet examen des comptes publics, le Parlement n’est en fait malheureusement qu’une chambre d’enregistrement. Pour y remédier, j’ai déjà formulé une proposition que je réitère aujourd’hui : réduisons de deux mois le délai dont dispose l’État pour clôturer ses comptes ; passons de fin juin à fin avril. Pour y arriver, réduisons ce délai de quinze jours par an pendant quatre ans. Je sais que la démarche a déjà été entreprise, mais il faut la poursuivre. Rien ne justifie que les sociétés arrivent à clôturer leurs comptes rapidement et que l’État n’y parvienne pas.

Le dépôt à l’Assemblée nationale d’une proposition de loi organique relative à la mise en œuvre de la LOLF devrait, je l’espère, nous permettre d’avoir un nouveau débat sur le sujet et de réviser en profondeur le calendrier budgétaire.

Des parlements bien informés et compétents sont à même de doter leur pays de lois et de politiques cohérentes et d’assurer ainsi un contrôle démocratique légitime sur les politiques et les actions de l’exécutif.

Je partage les propos qui ont été tenus : redonnons du tonus démocratique à nos interventions budgétaires ! Nous en avons besoin. Ce travail collectif, nous devons l’entreprendre. Pour ma part, j’y suis prêt.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion