Intervention de Didier Marie

Commission des affaires européennes — Réunion du 12 mai 2021 à 13h35
Institutions européennes — Réunion conjointe avec la commission des affaires européennes du sénat roumain

Photo de Didier MarieDidier Marie, vice-président de la commission des affaires européennes :

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mes chers collègues, dans le sud-est européen, sept pays attendent aux portes de l'Union européenne. Cinq sont officiellement candidats à l'adhésion (Albanie, Macédoine du Nord, Monténégro, Serbie et Turquie) et deux sont des « candidats potentiels » (Bosnie-Herzégovine et Kosovo). Pour les Balkans, frappés par une longue guerre fratricide durant les années 1990, l'intégration européenne signifierait d'abord la fin des tensions bilatérales. Pour l'UE, intégrer cette région signifierait une sécurité accrue dans cette zone, soumise à d'importantes tensions géopolitiques et à l'influence de grands acteurs, Russie mais aussi Turquie et Chine.

À Bruxelles et dans de nombreux États européens, on invoque souvent la nécessité de réunir les peuples européens. Quand l'ouverture de nouvelles négociations d'adhésion est repoussée de quelques mois, comme lors du Conseil européen d'octobre 2019, on dénonce une erreur historique et une injustice. Les États candidats y voient une promesse non tenue, comme si rejoindre l'Union devait être quasi automatique. Finalement, au fur et à mesure, le processus d'élargissement s'est vidé de sa substance pour ne devenir qu'une question technique et mécanique : il évaluait la capacité d'un État à intégrer l'Union sur sa seule capacité à adopter dans son droit interne un ensemble de règles supposées représenter les standards européens. Or ces règles ne peuvent se comprendre indépendamment de la population et de la culture juridique du pays dans lequel elles ont vocation à s'appliquer.

C'est parce que cela avait été oublié que la France a tenu à revoir le processus d'élargissement avec une approche renouvelée, reposant sur 4 principes : une association graduelle, des conditions rigoureuses, des bénéfices concrets et réciproques et une réversibilité pour rendre le processus plus dynamique.

En février 2020, la Commission européenne a formulé une proposition de réforme du processus d'adhésion à l'UE. Celle-ci vise à le simplifier en regroupant en six groupes thématiques la trentaine de chapitres de négociations : «fondamentaux» (état de droit notamment), marché intérieur, compétitivité et croissance inclusive, programme environnemental et connectivité durable, ressources, agriculture et cohésion, relations extérieures. L'exécutif européen propose également aux États membres d'être davantage associés au processus, en participant plus systématiquement à son suivi et à son examen. Enfin, la Commission suggère que les négociations puissent être suspendues dans certains domaines par les pays de l'UE, voire totalement arrêtées dans les cas les plus graves. De même, la proposition avance la possibilité de rouvrir des chapitres de négociations déjà clos en cas de manquements de la part des États candidats les concernant.

À la suite de cette proposition de réforme, les négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord ont été ouvertes en mars 2020. La Commission a alors travaillé sur un cadre de négociation qu'elle a présenté aux États membres en juillet 2020. La nouvelle méthodologie était principalement destinée à l'Albanie et à la Macédoine du Nord, qui n'ont pas encore entamé leurs négociations d'adhésion à l'UE. Mais la Serbie et le Monténégro, dont les négociations avec l'UE sont bien avancées, ont été autorisés à choisir de passer ou non à la nouvelle méthodologie : tous deux ont opté pour le nouveau régime.

Les États membres de l'UE viennent, la semaine dernière, d'approuver la mise en oeuvre de cette nouvelle méthodologie révisée dans les négociations de pré-adhésion avec la Serbie et le Monténégro : nous avons bon espoir que le processus d'élargissement gagne ainsi en dynamisme, qu'il devienne plus crédible et porté par un pilotage politique plus fort. Partagez-vous le même espoir ?

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