Je ne suis pas certaine que le monde anglo-saxon soit plus ouvert, au contraire. En France, il y a une culture de la course au large en solitaire. Nous, les femmes, avons fait nos preuves. Le fait que nous puissions naviguer au même niveau est maintenant accepté. La France me semble beaucoup plus ouverte que le monde anglo-saxon.
Sur l'équipage, plusieurs questions peuvent se poser. J'ai participé il y a quelques années à une conférence médicale sur les femmes dans le sport. Quelqu'un avait souligné qu'il n'y avait que peu de temps que les femmes avaient le droit de faire du sport. Auparavant, elles devaient porter des jupes jusqu'aux chevilles, ce qui ne leur permettait pas de faire du sport. Cette évolution explique le retard qu'accusent les femmes dans le monde de la voile. La performance vient avec l'expérience. Il faut acquérir cette expérience pour arriver au même niveau que les hommes. Comme nous sommes moins nombreuses, lors de la constitution d'un équipage, le choix est forcément plus large parmi les hommes. S'y ajoute la question physique. La course en solitaire est très difficile pour tout le monde, et les différences physiques sont compensées par la force mentale. Dans ce domaine, je crois que les femmes ont un petit avantage. En équipage, en revanche, la force physique a bien plus d'importance, chaque manoeuvre se déroulant très rapidement. Nous pouvons alors être jugées sur notre force et notre taille. C'est un problème. Des changements de règles ont déjà eu lieu. J'ai été skippeuse au sein de l'équipage féminin du Volvo Ocean Race en 2014. Je rêvais de participer à cette course lorsque j'étais enfant, mais j'avais abandonné ce rêve. Il n'était pas possible d'y être performante en tant que femme, tant cette course était physique. Les organisateurs ont donc changé les règles et ont autorisé les équipages féminins à prendre trois personnes de plus à bord. Nous étions onze au lieu de huit, pour arriver à un équivalent musculaire sur les bateaux. Cela nous a permis d'être performantes. Puisqu'il nous manquait de l'expérience, nous sommes tout de même restées derrière. Nous savions toutefois qu'en nous entraînant, nous aurions été capables de gagner grâce à cette égalité de force physique.
Je pense que l'équipage est un sujet auquel il faut réfléchir. Faut-il imposer des quotas ? Il faut accepter que les hommes et les femmes sont physiquement différents. Autoriser un nombre de femmes plus important sur les équipages féminins rend par exemple les situations équitables.