Le problème se pose en effet dès l'école primaire. Le plan « mathématiques » mis en place en 2019 vise aussi le premier degré. Il faut changer les méthodes. La méthode de Singapour commence à gagner du terrain, y compris dans l'éducation nationale. De nouvelles éditions seront publiées pour aider les parents à soutenir leurs enfants. Il faut remédier à cette tendance fâcheuse en France, comme si on voulait que les parents n'y comprennent rien, pour les tenir à l'écart... La situation évolue. Les manuels deviennent plus pratiques. On remet aussi l'accent sur les fondamentaux, la répétition des tables de multiplication, le calcul mental. Cela répond aussi à la question sur le numérique : on ne peut en tirer profit que si l'on maîtrise les fondamentaux.
Un assentiment général se dessine en faveur d'une pédagogie plus simple, avec des manuels plus accessibles, pour que les enseignants du primaire se sentent aussi plus à l'aise. Une licence consacrée à la formation des professeurs des écoles, avec une option mathématiques, a été créée pour améliorer le niveau des enseignants et pour qu'ils puissent enseigner cette discipline avec confiance. Mais l'éducation est un lent paquebot : une mesure prend des années avant de produire ses effets. L'effort est engagé, laissons-lui le temps de produire ses effets.
Peut-on mener une politique salariale différenciée ? Sans doute non. Toutefois, les débouchés en mathématiques dans le secteur privé sont plus élevés qu'en histoire. À niveau de formation égale, les professeurs touchent 25 % de moins que dans le privé. Cela n'incite pas les élèves à se tourner vers l'enseignement. Je suis favorable à une rémunération différenciée, mais je crois qu'il est impossible de la mettre en place.
La méthode d'enseignement doit revenir à la simplicité et cesser de se fixer comme objectif de rompre avec les parents. Ces derniers ne sont pas inutiles à la réussite scolaire des enfants, contrairement à ce que croient certains pédagogues, heureusement minoritaires. Ils peuvent être utiles, encore faut-il parler le même langage ! Les parents et le corps enseignant doivent être solidaires.
Tous les ministres ont voulu réduire le nombre de contractuels, mais ceux-ci constituent une soupape de gestion. La part des contractuels est passée de 5,8 % à 8,8 % dans toutes les disciplines, et de 2,8 % à 6,7 % en mathématiques. Cette hausse n'est pas le fruit d'une volonté, mais plutôt d'une incapacité à recruter et d'un problème profond.
Les tablettes et le numérique ne profitent qu'à ceux qui maîtrisent déjà les bases et leurs tables d'opérations, sinon cela relève du magique.
La baisse du niveau moyen commence à avoir des effets sur l'élite. Nos mathématiciens d'aujourd'hui bénéficient de l'excellence d'hier : en 2017, seul 1 % des élèves atteignent le niveau atteint par les 10 % des élèves les plus performants il y a trente ans. Dans l'OCDE, 25 % des élèves en moyenne sont dans le premier quart de niveau, mais seulement 13 % en France.
Didier Rambaud a raison, le primaire est le maillon faible. Cela vaut pour toutes les matières, mais la dégradation est encore plus nette pour les mathématiques. Il faut donc mettre l'accent sur la formation permanente des enseignants.
Roger Karoutchi a exprimé son constat désabusé sur la capacité du système à se réformer. C'est une nécessité. La baisse des effectifs à l'avenir devrait donner des marges de manoeuvre à l'éducation nationale. Il est aussi possible de rationaliser l'offre d'enseignement pour dégager des moyens.
La concurrence du privé est réelle, même si les salaires sont identiques dans l'enseignement privé sous contrat. Les professeurs peuvent donner des cours dans le privé, et l'on constate que l'offre d'enseignement privé explose. Certes, cela peut creuser les inégalités. La nature ayant horreur du vide, dès qu'une faiblesse apparaît dans le public, une offre dans le privé apparaît pour la pallier.
Mon but était de poser les termes du problème et de voir quel effort budgétaire pourrait être accompli dans une discipline fondamentale pour les sciences et notre pays. Il faut privilégier les carrières scientifiques et faire en sorte que les matières scientifiques ne soient pas seulement un élément de sélection dans les cursus.