Monsieur Savary, concernant l'espace numérique en santé, la généralisation du dispositif est bien prévue le 1er janvier 2022 ; d'ici fin juillet, une expérimentation sera lancée dans trois départements : la Haute-Garonne, la Somme et la Loire-Atlantique. Dans l'intervalle, nous démarrons également une campagne d'information grand public. Monsieur Savary, cela marchera. En l'espace de trois ans, la France va devenir un pays leader dans le domaine du numérique en santé. Ce qui a été lancé en matière de numérique, avant même ma prise de fonctions, doit nous permettre de faire un bond en avant.
J'assistais récemment au congrès des réanimateurs. Les médecins intensivistes réanimateurs (MIR) et les médecins anesthésistes-réanimateurs (MAR) souhaitent une augmentation du nombre d'internes en formation, et je suis favorable à cette idée. Cela étant, il y a environ 260 postes d'internes à pourvoir cette année, dont la moitié de médecins généralistes, ce qui veut dire une augmentation de 130 postes, à répartir dans les différentes spécialités, avec un certain nombre d'engagements pluriannuels déjà pris ; je pense à la psychiatrie et à la pédiatrie. J'ai donc dit qu'il y aurait, cette année, une augmentation du nombre d'internes formés pour les MIR et les MAR ; que cette augmentation serait plus sensible l'année prochaine, avec 400 postes à répartir, et plus conséquente encore l'année suivante.
Tous les pays qui nous entourent - l'Italie, l'Allemagne, la Grande-Bretagne - rencontrent le même problème que nous au sujet de la vaccination des soignants. Nous déplorons en effet chez les soignants un taux de vaccination parfois plus faible que dans la population générale ; cela est notamment vrai dans les Ephad, alors que la vaccination pour cette population est possible depuis janvier dernier. Nous mettons en oeuvre toutes les campagnes de communication et de mobilisation. Je constate que, dans certaines Ehpad, seulement 10 % du personnel sont vaccinés, alors que dans d'autres le taux monte à 90 %. Le problème n'est donc pas national, mais concerne certains établissements.
Je souhaite que la couverture vaccinale de nos soignants augmente durant l'été, sans quoi, vraisemblablement en septembre, je serai amené à proposer une vaccination obligatoire. Dans l'hypothèse d'une nouvelle vague en octobre ou en novembre, je ne veux pas voir les Ehpad se refermer parce que le virus y aurait circulé et que les soignants n'auraient pas effectué ce geste éthique.
En tant que médecin, quand je suis arrivé à l'hôpital public pour enfiler ma blouse, j'ai dû attester du fait que j'étais vacciné contre l'hépatite B, entre autres maladies. Nous allons accompagner les soignants qui doutent, mais je ne laisserai pas les Ehpad à nouveau infectés par le virus. Dans un Ehpad des Landes, six soignants ont été infectés par le variant Delta ; parmi eux, cinq n'étaient pas vaccinés ; et alors que la plupart des résidents de l'Ehpad sont vaccinés, vingt-trois ont quand même attrapé le virus, dont trois qui ont dû être hospitalisés.
Concernant les étudiants, je vous confirme que nous n'avons pas besoin d'un décret ; 200 internes sont actuellement en poste dans les zones sous-denses, selon le mécanisme apporté par le Sénat à la loi OTSS.
Monsieur Mouiller, les 183 euros nets par mois concernent le personnel soignant des structures rattachées à la fonction publique hospitalière et des structures médico-sociales Nexem, Croix-Rouge, Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés solidaires (FEHAP). Le périmètre s'étendra aux structures sociales - je pense à l'aide sociale à l'enfance (ASE) et à la protection maternelle et infantile (PMI) -, avec une conférence d'ici là a fin de l'année dans la continuité des travaux de M. Laforcade.
Les 600 millions d'euros dédiés au numérique dans les Ehpad vont servir à la fois à l'équipement en tablettes, en réseaux et en applications. Sachant que l'on recense environ 600 000 résidents en Ephad, l'investissement s'élève donc à 1 000 euros par résident.
Madame Micouleau, j'entends parler tous les jours de la fuite des soignants d'un secteur à l'autre. Je n'ai pas, à ce stade, de chiffres attestant d'une quelconque fuite de soignants. En revanche, on observe des mobilités. De manière plus générale, je suis attentif au nombre de futurs soignants qui s'inscrivent dans les formations ; et il augmente. D'ailleurs, depuis le Ségur de la santé, le nombre de départs dans l'ensemble des secteurs s'est réduit, malgré l'impact de la crise.
Pourquoi attendre le 1er janvier 2022 pour le versement de l'augmentation salariale ? Les syndicats se sont engagés sur cette date pour appliquer l'accord dans le secteur médico-social.
Madame Micouleau, vous avez évoqué le fait que des infirmiers ou des infirmières libéraux se sentent menacés par une augmentation d'autonomie des aides-soignants. Notre système de santé est un système merveilleux, dans lequel tout le monde est très impliqué, mais où tout le monde se sent menacé et exprime le désir de se sentir spécial par rapport aux autres ; je peux le comprendre, mais cela ne doit pas empêcher notre système de tenir compte de l'évolution des compétences et des missions de chacun. Il n'y a donc aucune remise en question du rôle des infirmiers libéraux dans le système de santé, de même que les aides-soignants ne sont pas menacés par le développement des assistants de gérontologie.
Ma logique est de permettre aux gens de coopérer et d'avoir un peu plus d'autonomie. Notre pays a 30 ans de retard ; on a perdu 10 ans à savoir si l'on allait parler de « transfert de compétences » ou de « délégation de tâches » ; ensuite, nous avons parlé de « pratiques avancées », de « coopération » ; même les mots provoquent des crises dans le secteur de la santé. La crise sanitaire a prouvé, en soutenant les gens qui se mobilisent sur le terrain, que nous étions capables de faire bouger notre système de santé. Aucune profession ne doit se sentir menacée dans son intégrité et sa capacité à soigner les gens.
En Israël, l'impact sanitaire est faible. La vaccination protège du variant Delta à plus de 80 % et du risque d'hospitalisation à 90 %, voire 94 %. Même si l'on tombe malade, le vaccin permet d'éviter les formes graves et les hospitalisations ; c'est cela qui nous importe.
Madame Micouleau, la logique est de rouvrir notre pays sans abandonner les gestes barrières. Le variant Delta représente actuellement près de 10 % des nouvelles contaminations dans notre pays ; nous sommes au même niveau que l'Allemagne et les États-Unis. Ce variant va devenir majoritaire, car il est 60 % plus contagieux. Il faut se faire vacciner, c'est fondamental.
Aujourd'hui, nous sommes capables de tracer les clusters avec une précision redoutable. Cette traçabilité très fine, quartier par quartier, nous permet d'avoir un contact-tracing opérationnel, y compris rétrospectif - à la japonaise -, en remontant les chaînes de contamination. Néanmoins, avec un variant contagieux et des personnes encore non vaccinées, des départs épidémiques sont possibles. Dans les Landes, 70 % des souches virales en circulation correspondent désormais au variant Delta ; dans ce département, le taux d'incidence a augmenté de 10 % en une semaine ; à ce stade, il n'y a pas d'impact sanitaire, les jeunes sont principalement touchés, mais nous avons appris à rester vigilants.
Madame la sénatrice, la meilleure réponse est : vaccination. Hier, nous avons réalisé 90 000 primo-injections de moins que ce que nous étions en mesure de réaliser. Je le dis aux Français : la campagne vaccinale n'est pas terminée. Nous ne sommes pas face à une situation inhabituelle ou exceptionnelle ; partout autour de nous - y compris aux États-Unis, et en Israël -, on arrive à cette forme asymptotique quand on atteint les 60 % de vaccination dans la population adulte. Il faut augmenter cette couverture vaccinale ; une personne vaccinée aujourd'hui peut avoir son rappel dans trois semaines et disposer de son pass sanitaire pour les vacances à la mi-juillet ; ce message doit notamment être entendu par la population jeune qui peut faire circuler le virus.
Dans les Landes, on commence à observer un début de diffusion communautaire. Pour empêcher la reprise épidémique, nous savons faire. Il y a un an, nous sommes parvenus à interrompre l'épidémie en Mayenne ; nous ferons le maximum pour l'interrompre également dans les Landes.
On compte actuellement 2 000 cas de virus par jour en France ; c'est vingt, voire trente fois moins qu'il y a quelques semaines, et nous serons sans doute à 1 000 cas dans une semaine. Mais tant que la guerre n'est pas finie, il ne faut pas se désarmer.
Madame Cohen, vos réflexions rejoignent celles des syndicats. Les psychologues bénéficient du complément de traitement indiciaire (CTI) à l'hôpital et ont touché les 183 euros nets de plus par mois. Ils pourront également percevoir la prime d'engagement collectif - le fameux pilier 3 des revalorisations du Ségur de la santé -, permettant aux soignants de toucher jusqu'à 100 euros nets de plus par mois quand ils sont engagés dans des programmes d'engagement collectif.
Je vous confirme que les revalorisations de grilles concernent les soignants, les filières médico-techniques et les personnels de rééducation. Les psychologues du secteur hospitalier ne sont pas concernés. Mais les assises de la santé mentale et de la psychiatrie, qui doivent se tenir en septembre, permettront d'améliorer et de renforcer encore la place des psychologues dans le système de santé.
Concernant les infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE), j'ai reçu les syndicats et, plus que cela, j'ai organisé une visioconférence où chaque IADE était invité à participer ; sur les 12 000 IADE que compte notre pays, la moitié était présente à cette visioconférence. Nous avons débattu à bâtons rompus, notamment avec la CGT, et nous avons pu, je crois, lever un certain nombre d'incompréhensions. Les IADE bénéficient de la reconnaissance d'une spécialité infirmière, avec les bonifications qui vont avec - notamment la nouvelle bonification indiciaire (NBI), une prime qui augmente leur rémunération. Par ailleurs, ils ne sont pas du tout déclassés ou dégradés par rapport aux IPA ; nous avons débattu de la différence des missions.
Une mission est en cours à l'inspection générale des affaires sociales (Igas) concernant la filière de réanimation, qui nous permettra de réfléchir sereinement, avec les représentants des IADE, à la manière de faire évoluer leur profession. Par exemple, je suis sensible au fait que ces infirmiers se retrouvent parfois seuls à bord pendant l'opération d'un malade et qu'ensuite, en salle de réveil, ils ne puissent pas prescrire de paracétamol.
Concernant les rémunérations, grâce au Ségur de la santé, un IADE en fin de carrière peut toucher davantage qu'un anesthésiste en début de carrière.
Sur les grilles salariales, j'observe à la fois une incompréhension et une volonté manifeste, chez certains non-signataires du Ségur de la santé, de transmettre une mauvaise information. Aucun médecin de l'hôpital public n'a perdu en ancienneté, en salaire ou en retraite. Comme dans toute réforme des grilles et des statuts de la fonction publique, quand vous signez un accord, cela concerne les flux entrants et non ce que l'on appelle - je n'aime pas ce mot, mais il figure dans la loi - les « stocks » de personnel. On a donc la création de deux grilles parallèles : une grille avec ceux qui « rentrent » après le Ségur de la santé, et une autre avec ceux qui étaient déjà dans la carrière. Certains ont cru perdre trois échelons ; ils conservent leur échelon et évoluent sur une grille parallèle différente.
Personne n'a perdu de l'argent à cause du Ségur de la santé. Par exemple, un couple de médecins praticiens hospitaliers, ayant mon âge et travaillant à l'hôpital public, avec la revalorisation de l'indemnité d'engagement de service public exclusif (IESPE), va gagner 10 000 euros nets de plus par an. Un praticien touchera 400 euros de plus par mois. Je peux comprendre que le Ségur de la santé ne réponde pas à toutes les attentes, mais je ne crois pas que les médecins démissionnent à cause de cela.
Enfin, je suis d'accord avec vous concernant la prise en charge insuffisante de la formation de certains aides-soignants dans les hôpitaux. Nous devons financer davantage de formations. Il n'est pas normal qu'un aide-soignant s'engageant dans une formation pour devenir infirmier, alors même que nous manquons d'infirmiers, ne puisse pas être davantage accompagné ; c'est une question de budget et nous y travaillons.