Intervention de Bruno Acar

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 27 mai 2021 à 9h35
Audition de M. Bruno Acar inspecteur général de l'administration chargé en 2020 d'un rapport pour le ministre de l'intérieur et la ministre en charge des collectivités territoriales sur « l'évaluation des politiques partagées entre l'état et les collectivités territoriales »

Bruno Acar, inspecteur général de l'administration :

Concernant le rôle des régions, je précise que notre rapport ne prévoit pas que celles-ci évaluent les politiques publiques partagées impliquant d'autres collectivités. Nous constatons simplement que les expertises disponibles sur un territoire (comme les services d'évaluation ou les chargés de mission) se trouvent principalement au sein des collectivités régionales. Nous estimons par conséquent que la région doit aider les autres collectivités à développer cette expertise. Cette suggestion découle du constat d'une hétérogénéité de la ressource, celle-ci se concentrant aujourd'hui dans les grandes collectivités comme les régions, certains départements, voire certaines métropoles. L'idée est donc la suivante : la région recenserait ces ressources avec l'appui du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et de ses délégations territoriales, puis ces ressources seraient mises à la disposition des collectivités intéressées.

La dimension relative au partage des compétences entre les collectivités est souvent prise en compte dans les évaluations de politiques partagées. Tel est systématiquement le cas au niveau des inspections générales et au niveau territorial, même s'il est parfois plus délicat pour les collectivités de suivre cette approche globale. Ainsi, nous ne manquons pas de formuler des observations sur le fait que le jeu des acteurs, l'articulation du rôle de chacun peuvent poser un certain nombre de difficultés qui pourraient justifier des évolutions institutionnelles. Malheureusement, ces propositions ne font pas l'objet d'un véritable suivi et ne sont pas exploitées.

Les citoyens ont effectivement vocation à être associés à l'évaluation des politiques publiques locales partagées. Cette évaluation de proximité offre en effet l'occasion de développer des approches innovantes permettant d'associer les citoyens. Un certain nombre de collectivités ont mis en place des dispositifs tout à fait intéressants dans ce domaine, comme Grenoble, Toulouse et Nantes. La presse professionnelle s'en est d'ailleurs fait l'écho. Ces collectivités ont adopté des méthodes très diverses : questionnaire, suivi d'un panel, conférences de consensus, jurys citoyens, etc. Toutefois, je partage totalement votre constat : de telles approches restent insuffisamment développées ou valorisées.

Ce sujet soulève également des questions complexes de « distanciation ». En effet, l'évaluation implique un certain recul par rapport aux politiques menées. Il faut par conséquent veiller à ce que les citoyens associés à cette évaluation ne soient pas directement concernés par celles-ci. Comment peut-on parvenir à recréer cette distance, à assurer la maîtrise technique nécessaire ou encore à identifier les responsabilités ?

On constate donc un certain nombre de problèmes méthodologiques. Cependant, cette association des citoyens me paraît être un élément incontournable. Je crois que les collectivités, tout comme l'État, voire davantage, sont très sensibles à cette préoccupation.

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