Intervention de Éric Dupond-Moretti

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 16 juin 2021 à 9h00
Numérisation de la justice — Audition de M. éric duPond-moretti garde des sceaux ministre de la justice et Mme Amélie de Montchalin ministre de la transformation et de la fonction publiques

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux :

L'administration pénitentiaire, sans possibilité de recours au télétravail, a bien fonctionné ; je tiens à rendre hommage à ses courageux agents qui ont effectué un travail formidable. Le respect des gestes barrières a permis à la fois que l'administration pénitentiaire poursuive son travail et que les détenus reçoivent des visites. Même si nous avons déploré un décès, il y a eu peu de contaminations et nous n'avons pas connu de mutineries, ce qui n'a pas été le cas dans les autres pays.

Au niveau de l'administration judiciaire également, la machine a continué à tourner. Symboliquement, il me paraissait indispensable de rappeler que la justice était une denrée essentielle et qu'elle pouvait continuer à assurer ses missions, même si l'utilisation de la visioconférence a pu être contestée par certains avocats.

Concernant les statistiques, j'ai demandé un certain nombre de travaux, notamment sur la récidive ; c'est important, car cela permet d'affiner une politique pénale. Nous disposons déjà de chiffres mais, assez curieusement par les temps qui courent, personne ne veut les entendre. Par exemple, sur les peines planchers : les peines prononcées étaient plus sévères après leur abrogation ; l'objectif n'a donc vraisemblablement pas été atteint.

Avec les chiffres dont je dispose, je peux dire également que la délinquance n'a pas baissé pendant cette période où les peines planchers étaient en vigueur - ce qui fait dire à certains syndicats de police que cela a été un fiasco. On connaît également le nombre de meurtres par an dans notre pays. Cela dit, je conçois qu'il faudrait affiner ces chiffres.

Les chiffres du ministère de l'intérieur et ceux du ministère de la justice ne disent pas deux vérités différentes, comme je peux l'entendre parfois. Prenons l'exemple des féminicides ; si un homme tue une femme, son acte sera qualifié de féminicide, mais la justice dira peut-être qu'il s'agit d'un homicide volontaire commis sur une femme, mais pas dans le cadre conjugal ; et cela, seule la justice peut le dire.

Il y a aussi des manières différentes de présenter certains chiffres. On a pu ainsi demander aux policiers de privilégier les mains courantes aux plaintes, dans le but de faire artificiellement baisser les chiffres de la délinquance ; mais personne n'était dupe.

Je suis tout à fait prêt à ce que l'on dispose de davantage de chiffres. Les ministères de l'intérieur et de la justice envisagent de créer ensemble un observatoire, notamment pour répondre à ces questions.

Par ailleurs, nous devons nous améliorer non pas sur l'exécution des peines, mais sur le moment où intervient l'exécution ; cela doit aller plus vite, et les chiffres peuvent nous permettre d'accélérer le processus.

Je dois également pouvoir rendre des comptes aux parlementaires. J'ai été interrogé à l'Assemblée nationale il y a deux jours sur le sujet de la récidive ; un rapport sera prochainement rendu public. Nous n'avons rien à cacher. J'entends bien ce que vous me dites et j'y suis sensible.

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