Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 29 juin 2021 à 14h30
Prévention d'actes de terrorisme et renseignement — Discussion générale

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Le texte prévoit aussi l’extension des relations avec les opérateurs de communications électroniques, qu’il s’agisse de l’usage des IMSI catcher à la faveur du déploiement de la 5G ou de l’interception des données satellitaires de proximité. Ce dernier dispositif permet un véritable chalutage des données personnelles qui revient, de fait, à placer sous surveillance l’ensemble de la population.

Mis en œuvre sur décision du Premier ministre, il est placé sous un contrôle qui reste à la marge de la CNCTR et sous celui, encore plus résiduel, de la délégation parlementaire au renseignement.

Comme à l’accoutumée pour ce type de texte très attentatoire aux libertés publiques, la commission des lois a toutefois joué son rôle de défenseur des libertés et droits fondamentaux en corrigeant le projet de loi pour anticiper les éventuelles censures constitutionnelles, s’agissant notamment des Micas, ou encore des mesures de rétention de sûreté.

Je continue cependant de m’étonner de la persistance de la logique qui préside à cette inflation législative, celle-ci n’ayant pas fait les preuves de son efficacité.

Mes chers collègues, les attentats terroristes de ces dernières années ont eu lieu sous le régime de ces mesures. Ne conviendrait-il pas à présent de faire le point sur notre stratégie en matière de lutte réelle contre le terrorisme ?

Ces trente dernières années, 16 lois ont été adoptées contre le terrorisme ; s’y ajoutent 32 lois visant à lutter contre la délinquance. Force est de constater que la plupart de ces textes s’attachent davantage à réduire nos libertés sous couvert de sûreté qu’à enrayer véritablement le terrorisme.

Ainsi, le problème perdure, alors que d’autres méthodes existent – ma collègue Éliane Assassi en a esquissé les contours en défendant notre motion tendant à opposer la question préalable. Elles reposent non pas uniquement sur le recours à des outils algorithmiques insensés, mais sur le renforcement du renseignement humain.

La tension entre liberté et sécurité a toujours existé. L’équilibre entre ces deux impératifs est fragile. La complexité de cette question et la nature même des activités de renseignement appellent un débat de fond, à la hauteur de l’enjeu. Un tel débat est nécessaire pour préserver cet équilibre et ne jamais tomber ni d’un côté ni de l’autre de cette ligne de crête.

Or l’engagement de la procédure accélérée ne le permet pas, pas plus – vous en conviendrez – que la présente période de pré-renouvellement présidentiel, durant laquelle nous légiférons pourtant.

Nous continuerons donc à nous opposer à cette surenchère sécuritaire, car nous sommes convaincus que, en l’état, celle-ci vise davantage à réduire les libertés qu’à s’attaquer véritablement à la menace terroriste qui pèse sur notre pays.

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