Intervention de Sébastien Missoffe

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 23 juin 2021 à 9h35
Audition de Mm. Sébastien Missoffe vice-président directeur général benoît tabaka directeur des relations institutionnelles et des politiques publiques de google france anton'maria battesti responsable des affaires publiques et martin signoux chargé des affaires publiques de facebook france

Sébastien Missoffe, vice-président, directeur général de Google France :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, merci de nous recevoir. Nous savons combien votre commission et le Sénat sont engagés sur l'ensemble des questions touchant au numérique. Vous l'avez dit, cette liste est longue.

Il nous a semblé très important, avec Benoît Tabaka, de venir aujourd'hui répondre de vive voix à toutes vos interrogations.

Quelques mots avant d'entrer dans le vif du sujet concernant les questions touchant à la culture : je tenais à vous redire, au nom des 1 200 collaborateurs que compte Google en France, combien nous nous sommes mobilisés pour affronter la crise sanitaire en contribuant, dans tous les territoires, à l'information des Français et à leur appropriation des outils du numérique, dont on a vu combien ils étaient nécessaires durant ces mois difficiles.

En effet, nous sommes absolument convaincus, vous le rappeliez, que la réussite ne réside pas dans la technologie mais passe par les femmes et les hommes qui savent s'approprier cette technologie. Nous avons donc fait une priorité de la formation aux outils du numérique dans les territoires.

Depuis 2012, avec 300 partenaires locaux - les chambres de commerce, les agences pour l'emploi, les chambres de métiers et d'artisanat, les offices du tourisme et les universités -, nous avons formé plus de 600 000 personnes dans plus de 270 000 villes en France. C'est un engagement très important pour nous, et c'est vrai pour les utilisateurs au quotidien comme pour les PME et les entreprises.

Nous savons ce que nous devons à l'exception culturelle française. Nous sommes fiers de contribuer à son rayonnement. C'est vrai à l'international, puisque la moitié du temps de visionnage des créations françaises sur YouTube se fait aujourd'hui à l'étranger. C'est également vrai en France, où nous avons contribué à mettre en contact un certain nombre d'acteurs de la vie culturelle, entraînant de nouvelles audiences. Arte a ainsi pu conquérir de nouveaux publics, l'âge moyen du téléspectateur d'Arte sur YouTube étant de 35 ans, contre 50 ans sur le site ou 63 ans à l'antenne. La chaîne compte aujourd'hui près de 2 millions d'abonnés. On voit donc combien ces nouveaux moyens ont permis de continuer à garder le lien avec ces nouvelles audiences.

Nous savons aussi, vous le rappeliez, combien le numérique a bouleversé la culture. L'équilibre à trouver entre le secteur culturel et le secteur du numérique dépasse bien sûr notre seule entreprise, mais Google a toujours eu à coeur de comprendre les enjeux, d'écouter les inquiétudes et, à chaque fois, de se mobiliser pour trouver des solutions.

Google est aujourd'hui une entreprise internationale. C'est une entreprise « multilocale », qui est installée en France depuis dix-huit ans, et qui a su donner de plus en plus d'autonomie aux équipes de chaque pays afin de répondre à des enjeux locaux spécifiques. J'ai rejoint Google il y a quinze ans, et j'ai vraiment pu constater cette évolution, en particulier depuis quatre ans en France, où j'ai pris mes responsabilités.

Cela nous a permis de travailler en étroite collaboration avec les acteurs de la culture. Sans grande déclaration, nous avançons pas à pas. Cela prend du temps, nous en sommes pleinement conscients, et nécessite de multiplier des relations sereines, construites et pragmatiques, mais nous progressons et sommes fiers de nous différencier sur ce plan.

Je souhaiterais partager trois exemples qui illustrent cet engagement. Je parlerai brièvement de ce que nous avons fait en faveur de la valorisation du patrimoine, de la protection du droit d'auteur, et j'évoquerai bien sûr la question des éditeurs et des agences de presse dans le cadre des droits voisins.

Nous contribuons, en France, à la valorisation du patrimoine avec Google art and culture qui, depuis sa création en 2011, a installé une équipe d'une trentaine de personnes basées en France et développe des solutions qui permettent d'explorer en ligne l'art, l'histoire et les merveilles du monde. Vous pouvez aller admirer le plafond de Chagall à l'Opéra Garnier, en passant par la galerie des glaces du château de Versailles. Nous avons numérisé des kilomètres carrés de boiseries et d'espaces.

Vous pouvez également visiter la grotte Chauvet et je vous invite, par exemple, à vous immerger dans le travail de l'oeuvre de Kandinsky, avec une expérience entièrement numérique, que nous avons coproduite avec le Centre Pompidou quand les musées étaient fermés.

Ceci passe aussi par un engagement en faveur de la protection du droit d'auteur. Depuis plus de dix ans, nous avons su nouer des accords avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem), la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), la Société civile des auteurs multimédia (SCAM) pour l'usage de leurs oeuvres protégées. Il y a quelques semaines, nous avons conclu un partenariat très important avec la Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques (ADAGP) et la Société des auteurs des arts visuels et de l'image fixe (SAIF) pour les dix prochaines années.

Ce programme inclut une licence pour l'utilisation en France des oeuvres de leur répertoire et va plus loin avec un fonds pour les artistes membres, destiné à soutenir et rémunérer les auteurs des arts graphiques, plastiques et photographiques. Le ministère de la culture nous en a félicités.

La protection du droit d'auteur, c'est aussi la lutte contre le piratage. YouTube a développé dès 2007 un outil nommé Content ID qui fait référence en matière de reconnaissance automatisée de contenus et de lutte contre le piratage. Nous avons investi à ce jour plus de 100 millions de dollars dans son développement. En pleine période de l'Euro, vous pouvez imaginer qu'à chaque fois qu'un but est marqué par telle ou telle équipe, certains sont tentés de prendre un extrait de cette vidéo et de le mettre sur YouTube en temps réel. Nous recevons le flux depuis les ayants droit et ces vidéos ne vont pas sur YouTube. Elles sont enlevées directement. Cela joue un rôle considérable dans la protection du droit d'auteur, et c'est un des outils dont nous sommes le plus fiers.

En France, nous sommes allés plus loin sur ce sujet avec la signature, en 2017, d'un accord avec l'Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA), sous l'égide du Centre nationale du cinéma (CNC), afin de lutter plus efficacement contre le piratage en ligne, ce qui nous a permis d'avoir l'intégralité du catalogue de Gaumont et d'autres pour protéger encore mieux les différentes oeuvres.

Pour terminer, quelques mots sur notre engagement dans le soutien aux éditeurs et aux agences de presse dans le cadre fixé par la loi sur le droit voisin. Monsieur le président, vous rappeliez les changements que vit ce groupe : il est important pour nous de nous engager sur ce plan.

Il y a longtemps que ces échanges avec le secteur de la presse ont démarré. Il y a près de dix ans, en 2013, le fonds Google était le premier acteur du numérique, sur le plan mondial, à signer un accord avec le secteur de la presse. Au total, nous avons versé plus de 85 millions d'euros aux éditeurs à travers ces différents programmes. Nous sommes encore engagés aujourd'hui dans l'accompagnement de leur transformation numérique.

En juillet 2019, la France a été le premier pays à transposer la loi sur le droit voisin au profit des éditeurs et des agences de presse. Google a été la première entreprise engagée dans ces discussions, et nous sommes les premiers à avoir pu trouver un accord-cadre avec les 295 titres certifiés « information politique et générale » (IPG) par l'Alliance de la presse d'information générale (APIG). Cet accord a été réalisé avec une répartition transparente, objective et non discriminante vraiment unique.

Nous aurions sûrement pu faire mieux et différemment sur un certain nombre de points. Je ne referai pas le match aujourd'hui, mais je tenais à redire solennellement notre engagement devant vous : Google reconnaît les droits voisins, et je suis déterminé à trouver une solution. Nous avons eu plus de 200 réunions avec des éditeurs de presse et les agences de presse, et nous continuerons à travailler pour parvenir à des solutions.

C'est cet objectif qui nous a animés depuis mars 2020, et nous avons récemment annoncé étendre notre offre à davantage d'acteurs de presse, au-delà de la presse IPG. Nous avons aussi entendu les inquiétudes exprimées ici et là au sujet du rapport de confiance. Nous avons annoncé vouloir investir en rétablissant cette confiance et en partageant les données avec un tiers de confiance. Bref, nous prenons chacun de ces sujets très au sérieux, nous écoutons les inquiétudes et travaillons à des partenariats qui, nous en sommes convaincus, nous permettront d'avancer.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je tenais à nouveau personnellement à vous remercier de votre invitation. Aujourd'hui, nous avons très à coeur de prendre en compte l'exception culturelle française et de travailler main dans la main avec les acteurs de la culture.

Je vous remercie pour votre attention. Je suis à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

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