Intervention de Bernadette Malgorn

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 24 juin 2021 à 9h30
Audition de bernadette malgorn ancienne préfète de région et ancienne secrétaire générale du ministère de l'intérieur élue municipale et métropolitaine de brest

Bernadette Malgorn :

Effectivement, on souligne aisément le risque de la politisation, mais moins l'évolution même du métier, qui est un métier de vocation. Ce métier souffre d'un problème d'attractivité. L'accroissement des nominations extérieures signifierait que les sous-préfets en passe d'être nommés préfets n'auraient pas de perspectives de carrière. Selon moi, il ne faut donc pas aller dans ce sens.

En ce qui concerne la question de l'externalisation et du recours aux contractuels, l'Etat ne peut pas développer en son sein toutes les expertises. La délégation de service public doit être encadrée et l'Etat doit conserver sa capacité de maîtrise d'ouvrage, pour énoncer le besoin que l'on veut voir couvrir par l'externalisation.

Quant à l'embauche de contractuels pour faire face à un manque d'attractivité de certaines localisations, il s'agit d'un élément devant entrer en ligne de compte lorsque l'on réfléchit à la reconfiguration du réseau territorial.

Certains sujets ont en outre été occultés. La gestion de la poussée de l'immigration a par exemple nécessité de recourir à des contractuels. Les files d'attente aux portes des préfectures et des sous-préfectures sont en effet constituées d'étrangers en attente d'étude de leur dossier. Il a donc fallu recourir à des contractuels pour répondre à ces demandes.

Certes, le préfet est de plus en plus poussé à jouer un rôle descendant. Un cadre dirigeant est-il nécessaire pour faire ce métier ? Avec les réseaux sociaux et internet, chacun peut se rendre compte des décisions du Gouvernement et des débats du Parlement. Nous pouvons relier ce phénomène à une tendance managériale, que l'on constate également dans le monde de l'entreprise, avec le débat sur le malaise des cadres et des hiérarchies intermédiaires. Si ce rôle de préfet se borne à commenter ce dont chacun peut se rendre compte, s'agit-il véritablement d'un métier ? Dans ce cas, des amateurs, proches du pouvoir politique, feraient sans doute de meilleurs commentateurs que les hauts fonctionnaires. Cette tendance n'est pas liée à la centralisation ni à la déconcentration, mais renvoie au fonctionnement interne de l'Etat. Il s'agit d'une méthode de gouvernance, qui se traduit par un affadissement de la responsabilité administrative et politique, supplantée par la responsabilité pénale. La gestion chaotique de la crise sanitaire peut ainsi s'expliquer par une identification des risques pénaux dans la gestion de ce type de crise. Les décisions ont dès lors été prises par celui qui ne courait pas de risques en la matière, le Président de la République, qui s'est doté d'un Conseil de Défense, sans transparence. Or, pour résoudre une crise, l'efficacité suppose que chacun des acteurs soit conscient de son rôle et de ses relations avec les autres responsables.

Pour répondre à une autre question, s'agissant de la mise en oeuvre des politiques, nous disposons désormais d'outils, tels que les téléprocédures ou l'accès de plus en plus large à des données. A ce titre, des médiateurs sont nécessaires. Plusieurs dispositifs ont été mis en place, avec des résultats qui semblent très variables en fonction des territoires. Ils sont parfois forcément appréciés, alors que parfois, ils demeurent à peine identifiés. Or, pour les citoyens, l'ensemble des services publics forme un tout.

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