Intervention de Jérôme Gavaudan

Mission d'information Uberisation — Réunion du 14 septembre 2021 à 9:5
Audition commune de représentants des chambres des métiers et de l'artisanat du conseil national des barreaux du conseil national de l'ordre des architectes du conseil supérieur de l'ordre des experts comptables et du conseil national de l'ordre des médecins

Jérôme Gavaudan, président du Conseil national des barreaux :

Je constate que certaines questions sont communes à toutes nos activités.

Sur les plateformes de mise en relation, nous rencontrons les mêmes problématiques de sécurité, de précarisation et de dumping. Nous revendiquons, en tant qu'avocats, de participer au marché du droit et d'être des entrepreneurs. Les legal tech privées, souvent créées par de jeunes avocats, semblent s'essouffler : peu de fonds y sont investis, à hauteur de 5 ou 6 % du financement de l'ensemble des plateformes juridiques.

Au niveau national, les avocats sont d'abord rattachés à leur ordre : il y en a 164 en France, que le Conseil national des barreaux coordonne. Nous avons créé notre propre plateforme, avocats.fr, sur laquelle le justiciable trouvera un avocat inscrit à un barreau et qualifié. Ainsi, la profession reprend en main un marché qui intéresse moins les petites entreprises.

Elle le fait en garantissant le secret professionnel - sujet fondamental qui est abordé dans le projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire. Le secret professionnel constitue un tout, qui ne saurait être saucissonné : il ne concerne pas que l'enquête ou le pénal, mais s'applique aussi par exemple quand un médecin ou un expert-comptable nous interroge sur le financement ou la fiscalité. Un magistrat, un intermédiaire n'a pas à connaître le nom des personnes, la nature ou le sujet de la consultation.

La plateforme propose également une convention d'honoraires en ligne : en application du principe de liberté de commerce et de l'industrie, chacun fixe ses prix.

La consultation et l'information juridiques en ligne sont des sujets plus préoccupants. La profession d'avocat est réglementée, mais il n'y a plus de monopole en matière de droit. La frontière est parfois difficile à cerner. Tout un chacun peut donner des informations juridiques, et des plateformes existent à cet effet. La consultation juridique n'est pas réservée aux seuls avocats : les notaires, les associations, les syndicats peuvent en proposer, mais leur intervention est encadrée par la loi de 1971, modifiée par une loi de 1991.

Certains sites sont sérieux, mais d'autres donnent de mauvais conseils juridiques. La jurisprudence a admis la mise à disposition en ligne de modèles de saisine de juridiction - or si le recours à un avocat n'est pas toujours nécessaire, l'application d'un modèle mal compris peut engendrer des catastrophes ! La problématique est la même chez les médecins, les artisans ou d'autres professionnels.

Nous nous battons aux côtés de la Direction des affaires civiles et du sceau du ministère de la Justice pour élaborer une définition plus précise de la consultation juridique, qui interdirait à des legal tech ou des plateformes de consultation en ligne de donner des conseils sans en référer à un professionnel.

Nous avons redouté une précarisation de la profession d'avocat et un risque de dumping, mais nous ne sommes pas pour l'instant confrontés à ces difficultés.

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