Je n'ai pas à me prononcer sur les discussions politiques entre les assemblées, même si ces considérations ne me sont pas complètement étrangères. En revanche, je ne pense pas du tout qu'une telle démarche de modernisation de la gouvernance de nos finances publiques soit à contretemps. J'observe au contraire que plusieurs rapports - je pense à ceux de la Cour des comptes ou à celui de la commission présidée par votre ancien collègue Jean Arthuis - ont plaidé en faveur d'évolutions en ce sens.
La crise a constitué une forme de parenthèse. La situation des finances publiques est plus dégradée qu'auparavant, et durablement. Des enjeux comme la maîtrise de la dépense et de la dette sont devant nous pour longtemps. Dans ce contexte, nous avons besoin de solidifier la gouvernance des finances publiques. Cela ne concerne pas seulement le Haut Conseil, qui est à mes yeux un tiers de confiance pour le Parlement. Son objet n'est pas de se substituer aux expertises auxquelles vous pouvez avoir recours. Il s'agit d'une institution unique, car indépendante, pluraliste, assise sur un texte organique et inscrite dans un écosystème européen. Vous le savez, en sortie de crise, il va aussi y avoir un débat sur la réforme des règles européennes. Je suis très fier de présider le Haut Conseil et d'avoir oeuvré à sa création dans un contexte où ce n'était pas très porteur. Il est très regrettable que le mandat du Haut Conseil soit l'un des plus restreints au sein de l'OCDE. Nous devons aller plus loin.
La proposition de loi organique nous en offre l'occasion. Je trouve dommage d'y apporter plusieurs restrictions, et notamment de remplacer le « réalisme » par la « cohérence », qui est une notion plus faible. Encore une fois, un système fermé peut être cohérent, mais, s'il est incomplet, il n'est pas réaliste. Nous en avons un exemple typique sous les yeux aujourd'hui. Il est aussi regrettable de ne pas avoir un débat sur la soutenabilité de la dette, qui sera une grande question politique et sociétale dans les années à venir.
Je me réjouirais donc que le texte puisse être amélioré à l'occasion de son examen en séance publique par le Sénat. Vous et nous avons besoin d'un Haut Conseil plus fort, avec un mandat plus large qu'aujourd'hui. Passer à côté d'une telle occasion ne nous permettrait pas d'attaquer la sortie de crise dans de bonnes conditions.
Il ne m'appartient pas de me prononcer sur les positionnements des assemblées. Mais, au regard de l'expérience qui est la mienne, y compris au sein de l'Union européenne, je sais qu'il n'est pas satisfaisant d'avoir un Haut Conseil - certes, il effectue un travail remarquable - avec des moyens et un mandat plus limités qu'ailleurs.
Monsieur le rapporteur général, comme je l'ai indiqué, il y aura sans doute des surplus de recettes et, peut-être, de dépenses. Simplement, aucune fourchette ne nous a été communiquée. Je ne peux donc pas vous donner de chiffres ; je peux seulement décrire une mécanique de flux. J'espère pouvoir revenir devant vous pour me prononcer sur le chiffre de 4,8 % retenu, qui est non plausible. Aura-t-il ou non été modifié ? Cela dépendra des arbitrages finaux qui seront rendus. Le rôle d'un conseil comme le nôtre est de tamponner et d'attester les chiffres. C'est, me semble-t-il, très important, y compris dans les discussions que nous avons avec les autorités européennes. En effet, comme vous le savez, l'avant-projet de budget de la France est transmis à l'Union européenne. Le Haut Conseil n'est pas invisible dans l'affaire. À ce stade, nous ne pouvons pas aller plus loin dans l'appréciation.