Même si, monsieur le ministre, vous n'étiez pas avec nous ces derniers jours, vous me permettrez d'être aujourd'hui un peu rapide et de ne pas redire tout ce qui a pu être dit, d'autant que Mme la ministre déléguée nous a fait le plaisir d'assister, le plus souvent possible, à nos débats.
J'évoquerai essentiellement aujourd'hui le problème des dépenses, moins celles de l'Etat que celles des collectivités locales, qui me paraissent appeler un certain nombre de clarifications.
S'agissant des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales, dont nous avons largement débattu ces deux derniers jours, force est de reconnaître que le niveau de ces crédits est tout à fait satisfaisant. C'est d'ailleurs parce que ces crédits existaient - nous avions en quelque sorte du grain à moudre ! - que pourra être entreprise la réforme des dotations de l'Etat aux communes, aux groupements de communes et aux départements que le Gouvernement a proposée et que le Sénat a adoptée hier, sous réserve que les départements, au cours de l'année prochaine, en vérifient les effets et repèrent les problèmes qu'elle pourra soulever.
Le principal problème concerne les seuils qui s'appliquent au passage d'une catégorie à une autre et qui sont parfois un peu abrupts. Le fait que certaines collectivités territoriales continuent à percevoir, en vertu d'un droit historique, la dotation de fonctionnement minimale peut paraître injuste à celles qui ne bénéficient pas de ce droit. Il faudra corriger cela en prévoyant un lissage.
Quoi qu'il en soit, des moyens financiers existent pour mener à bien la réforme. Nous ne pouvons que féliciter les ministres compétents - c'est-à-dire vous, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée - d'avoir obtenu de leurs collègues de Bercy les crédits nécessaires, notamment le maintien du contrat de croissance et de solidarité, ce qui n'allait pas de soi en cette période de pénurie budgétaire.
Il faut savoir souligner les points positifs : cela nous autorise à être critiques quand cela s'impose !
La réforme de la DGF des communes, des groupements de communes et des départements est forcément imparfaite ; nous en ignorons encore les effets, mais nous pouvons les redouter. Il faut toutefois reconnaître que cette réforme simplifie un domaine déjà extrêmement complexe, que le Parlement, notamment le Sénat, a contribué à rendre chaque année plus complexe encore en modifiant - après tout, c'est son rôle - à la marge telle ou telle disposition. Elle apporte donc plus de clarté, plus de lisibilité. Elle institue une dotation spécifique pour la péréquation. Au demeurant, l'effort financier très important qui est fait en faveur de la péréquation n'est rien d'autre que la mise en oeuvre du principe constitutionnel que nous avons voté voilà quelques mois.
S'agissant des moyens et de la réforme, je ne peux que marquer une réelle satisfaction.
Parallèlement, le projet de loi de finances pour 2005 met en oeuvre le financement de l'« acte II » de la décentralisation. Les transferts de compétences sont importants : 9, 6 milliards d'euros sont prévus entre 2004 et 2008, dont 5 milliards pour le revenu minimum d'insertion, le RMI, 2, 2 milliards pour les autres compétences confiées aux départements, 2, 2 milliards au profit des régions et 200 millions au profit des communes et de leurs groupements.
Les principes de financement de ces transferts sont conformes aux dispositions constitutionnelles. Désormais, en effet, le montant des transferts financiers doit être calculé sur plusieurs années et ces transferts se font essentiellement sur la base de transferts de fiscalité ou de parts de fiscalité, et non plus à travers des dotations.
Tous, nous nous félicitions : « Nous n'aurons plus, nous disions-nous, des dotations de l'Etat, mais des parts d'impôts ou des impôts totalement transférés. Nous pourrons donc nous appuyer sur cette fiscalité pour donner vie au principe d'autonomie des collectivités locales. Nous jouirons ainsi d'une certaine liberté. En tout cas, nos budgets ne dépendront plus des dotations annuelles que le Gouvernement propose au Parlement, et que, en général, ce dernier adopte. »
Cela peut apparaître comme un réel progrès, mais, à l'issue d'une année de mise en oeuvre, et même s'il est probablement trop tôt pour dresser un bilan, un certain nombre d'interrogations se font jour.
Je formulerai quelques remarques sur l'application de la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales.
Un léger différend opposait le Gouvernement et le Sénat. Le Gouvernement pensait qu'une disposition réglementaire permettrait de déterminer la part d'impôt partagé pour chaque collectivité. Le Sénat quant à lui, estimait que la loi était claire, disposant que « les ressources propres des collectivités territoriales sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont la loi les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette ». Il n'y avait donc pas là, à nos yeux, de place pour l'exercice du pouvoir réglementaire : il s'agissait d'un pouvoir propre du Parlement.
Le Gouvernement a bien voulu le reconnaître en déposant hier deux amendements qui vont dans ce sens et qui nous satisfont pleinement. Je veux souligner cette bonne coopération entre le Gouvernement et le Parlement, notamment le Sénat.