Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, à titre liminaire, de rendre hommage à celui qui présentait cet avis l'année passée, Daniel Hoeffel, dont chacun connaît le sens de l'intérêt général et sait quel immense travail il a accompli en faveur des collectivités territoriales.
La loi constitutionnelle du 28 mars 2003, complétée par la loi organique du 29 juillet 2004, a tracé le nouveau cadre des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, cadre particulièrement innovant et plus juste.
Monsieur le ministre, madame la ministre, dans cet exposé, je vais prononcer onze fois l'expression « c'est positif ». C'est dire que beaucoup de points sont satisfaisants dans ce projet de budget, même s'il y a aussi quelques bémols.
Tout transfert de compétences doit désormais être accompagné de l'attribution des ressources qui étaient consacrées à leur exercice. En acquerrant une valeur constitutionnelle, cette règle est devenue, pour la première fois dans l'histoire dans la République, une véritable garantie pour les collectivités territoriales. C'est positif. Et d'une !
Par ailleurs, les ressources transférées doivent être essentiellement fiscales, puisque la part des ressources propres dans l'ensemble des ressources de chaque catégorie de collectivités ne peut désormais être inférieure au niveau constaté en 2003. C'est positif. Et de deux !
Enfin, la loi prévoit des dispositifs de péréquation afin de renforcer l'égalité entre collectivités.
Le projet de loi de finances pour 2005 s'inscrit pleinement dans ce cadre. Nous nous sommes tous largement exprimés hier et avant-hier lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Je serai donc bref.
S'agissant, en premier lieu, du financement des compétences transférées, la commission des lois a constaté que les fractions non modulables de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances et du tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, respectivement attribuées aux départements et aux régions, ainsi que la taxe additionnelle à la taxe d'apprentissage créée en contrepartie d'une baisse de la dotation générale de décentralisation des régions constituaient des ressources propres au sens de la loi organique du 29 juillet 2004. C'est positif. Et de trois !
Elle a toutefois souhaité que les collectivités territoriales obtiennent rapidement la possibilité de les moduler, à la hausse ou à la baisse, l'autonomie fiscale constituant pour nous un fondement de la démocratie locale et un gage d'efficacité. Mon propos rejoint là celui de mon ami Michel Mercier.
Ce dernier et moi-même nous étions interrogés sur la constitutionnalité des dispositions du projet de loi de finances confiant au pouvoir réglementaire le soin de constater les fractions attribuées à chaque collectivité. Le Gouvernement et le Sénat ont pris en compte ces interrogations. Le texte de la loi s'en trouvera alourdi, mais sa sécurité juridique, améliorée. C'est positif.
Les concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, hors fiscalité transférée, progresseront de 3 % pour atteindre un montant de 61, 4 milliards d'euros en 2005, alors que l'ensemble des dépenses de l'Etat subira un gel en euros constants. C'est positif. Et de quatre !
Dans ce contexte, cette décision est même particulièrement remarquable, et je vous en félicite, monsieur le ministre, madame la ministre.
La commission des lois a souscrit à la reconduction pour un an du contrat de croissance et de solidarité, tout en rappelant le souhait des collectivités territoriales de bénéficier d'une programmation pluriannuelle des concours de l'Etat. C'est un voeu unanime des élus locaux.
Elle s'est félicitée de la réforme des critères de répartition de la dotation globale de fonctionnement des communes, des EPCI, des départements, observant qu'elle contribuerait à un renforcement de la péréquation, conformément à l'objectif posé par l'article 72-2 de la Constitution.
Je rappelle que la structure de la dotation forfaitaire des communes sera simplifiée et réformée afin de mieux prendre en compte la population et la superficie dans le calcul de leur dotation. C'est positif. Et de cinq !
Elle comprendra ainsi une dotation de base, d'un montant compris entre 60 et 120 euros par habitant, et une dotation proportionnelle à la superficie, de 3 euros par hectare pour les communes de plaine et de 5 euros par hectare pour les communes de montagne.
Initialement, cette dotation devait être plafonnée au montant de la dotation de base. Sur l'initiative de notre collègue Pierre JarIier, initiative à laquelle je me suis associé, le Sénat a, hier, supprimé ce plafonnement, sauf pour les communes de Guyane, qui présentent la particularité de disposer d'une superficie équivalant parfois à celle d'un département métropolitain ; pour ces communes, le plafond a toutefois été porté au double du montant perçu au titre de la dotation de base. C'est positif. Et de six !
Enfin, un complément de garantie permettra à chaque commune de disposer d'une dotation au moins égale à celle de 2004. C'est positif. Et de sept !
Les dotations de péréquation communales seront plus sélectives. Ainsi, les augmentations de la DSU et de la DSR, qui devraient atteindre 20 % en 2005, bénéficieront principalement aux communes disposant de zones urbaines sensibles, de zones franches urbaines ou de zones de revitalisation rurale. Je me réjouis, ayant cosigné l'amendement adopté, que le Sénat ait rétabli le coefficient de majoration de la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale prévu par le projet de loi de finances au bénéfice des communes disposant de zones de revitalisation rurale. C'est positif. Et de huit !
La dotation d'intercommunalité deviendra plus prévisible grâce à l'augmentation de 15 % à 30 % de la part de la dotation de base, à la simplification du coefficient d'intégration fiscale et à la mise en place d'une garantie de progression dépendant d'un coefficient fixé en valeur absolue et non plus en valeur relative.
Le Comité des finances locales, qui se réunira mardi prochain, devra fixer un taux de progression de la dotation des communautés de communes compris entre 130 % et 160 % du taux de progression de la dotation versée aux communautés d'agglomération, afin de réduire progressivement les écarts constatés dans les dotations entre ces catégories d'établissements publics de coopération intercommunale.
La dotation forfaitaire des départements sera revue, à l'instar de celle des communes, afin de mieux prendre en compte l'évolution des charges liées à la population. Elle sera désormais constituée d'une dotation de base, égale à 70 euros par habitant en 2005, et, le cas échéant, d'un complément de garantie.
La dotation de péréquation, qui n'était pas assez sélective, sera supprimée au profit d'un élargissement de la dotation de fonctionnement minimale à l'ensemble des départements ruraux et de la création d'une dotation spécifique à destination des départements urbains, appelée « dotation de péréquation urbaine ». C'est positif. Et de neuf !
La création de la dotation de péréquation urbaine sera exclusivement financée à partir de l'ancienne dotation de péréquation et grâce à la croissance de la masse, et en aucun cas au détriment des départements ruraux.
La décision que nous avons prise, hier, de laisser à cette réforme le temps de produire ses effets et de procéder à son évaluation avant de la modifier en profondeur me semble sage.
Enfin, pour mieux appréhender la richesse des collectivités territoriales, le potentiel financier sera substitué au potentiel fiscal pour l'attribution des dotations de péréquation communales et départementales, de la dotation globale d'équipement, de la dotation de développement rural, de la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux et du Fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France.
L'augmentation des crédits relatifs à l'administration territoriale permettra de financer la poursuite de la politique de déconcentration, qui est le pendant indispensable de la décentralisation. L'un ne peut pas aller sans l'autre. C'est positif. Et de dix !
L'affirmation du rôle des préfets de région et la réorganisation des services des préfectures en huit pôles me semblent aller dans le bon sens.
Je rappelle également qu'il faut veiller au maintien des services publics en milieu rural, même si des adaptations sont absolument nécessaires, et à leur diversification en milieu urbain. A cet égard, nous serons attentifs à la réorganisation du réseau des sous-préfectures.
Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, la commission des lois a décidé de donner un avis favorable quant à l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005.