Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 2 février 2022 à 15h00
Caractère universel des allocations familiales — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi du groupe Union Centriste, portée par notre collègue Olivier Henno, tend à rétablir l’universalité des allocations familiales, supprimée en 2015 durant le quinquennat de François Hollande et remplacée par une modulation pour les familles les plus aisées, au nom du redressement des comptes publics.

Alors que l’arrivée au pouvoir d’un Président de la République et d’une majorité parlementaire de gauche, en 2012, était porteuse d’espoirs et laissait entrevoir des progrès sociaux, la remise en cause de l’universalité des prestations familiales en 2014 a été l’un des symboles du refus de rupture du gouvernement de l’époque avec les restrictions budgétaires appliquées aux politiques sociales.

La modulation des allocations familiales n’a certes pas mis fin à l’universalité de l’accès aux prestations familiales, mais elle a entraîné la disparition de l’universalité du montant des prestations versées aux familles. Dès 2014, nous avions dénoncé la remise en cause du principe d’universalité de la protection sociale, hérité du Conseil national de la Résistance et pierre angulaire de notre politique familiale.

Contrairement à la fiscalité, qui remplit un rôle de redistribution verticale, les prestations familiales jouent un rôle de redistribution horizontale en faveur des familles ayant des enfants à charge, sans considération de leur milieu social ou de leurs ressources. Cette participation de chacune et chacun à notre système de protection sociale est fondamentale pour son existence. Or, en modulant les prestations familiales, on prend le risque que les plus aisés refusent de continuer de participer au financement de la sécurité sociale et préfèrent le système assurantiel. Ainsi, la modulation porte une atteinte à la cohésion sociale en renforçant le sentiment d’illégitimité des prélèvements.

En outre, il existe un lien entre la baisse de la natalité et la politique familiale menée.

Selon le rapport du Haut-Commissariat au plan du 15 mai 2021 consacré à la démographie, l’augmentation de la population française se poursuit, mais à un rythme moins important qu’entre 2008 et 2013. Sont en cause, toujours selon ce rapport, dans cette baisse quasi mécanique de la natalité, le vieillissement de la population et l’entrée plus tardive sur le marché du travail des nouvelles générations. Ainsi, la fécondité serait également un révélateur des difficultés à concilier vie familiale et vie professionnelle.

La politique familiale ne se résume donc pas au financement des prestations familiales. Bien d’autres facteurs entrent en ligne de compte, comme les congés accordés aux parents ou encore les moyens consacrés à l’accueil de la petite enfance. Or, vous le savez, nous connaissons des retards en la matière. Pour ce qui nous concerne, nous défendons depuis longtemps le principe d’un grand service public de la petite enfance.

Enfin, même si je sais que nous sommes très contraints par le périmètre de nos propositions de loi, je regrette que le présent texte ne rétablisse pas le versement des cotisations patronales à la branche famille. En effet, depuis la création du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en 2013, les employeurs étaient exonérés de ces cotisations. Depuis 2019, les cotisations des employeurs à la branche famille ont été purement et simplement supprimées et remplacées par l’affectation d’une part du produit de la TVA. C’est profondément injuste. C’est la raison pour laquelle nous continuons de plaider en faveur du rétablissement des cotisations sociales patronales.

Tout en ayant parfaitement conscience de l’intérêt politique pour le groupe Union Centriste de s’adresser aux familles les plus aisées à quelques mois des élections présidentielle et législatives, les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste voteront en faveur du rétablissement de l’universalité des allocations familiales, en parfaite cohérence avec notre opposition, en 2014, à la modulation des prestations familiales.

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