Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 2 février 2022 à 15h00
Amélioration de la prise en charge des personnes atteintes du trouble du déficit de l'attention — Débat organisé à la demande du groupe union centriste

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je salue tout d’abord le travail réalisé par nos deux collègues du groupe Union Centriste, à l’initiative de la proposition de loi visant à améliorer la prise en charge des personnes atteintes du trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.

Lors de la réunion de la commission des affaires sociales du Sénat, les auteures ont estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour discuter de cette proposition de loi en séance publique et ont préféré la retirer de l’ordre du jour de nos travaux et la remplacer par ce débat.

Je souhaite que ce soit le début d’un travail législatif fructueux, car c’est une question de santé publique qui dépasse les clivages politiques. Les troubles du déficit de l’attention concerneraient 2 millions de personnes en France, dont 800 000 enfants, soit entre 3 % et 5 % des enfants de 6 ans à 14 ans, auxquels il convient d’ajouter les adultes, très peu diagnostiqués.

Un tiers des enfants TDAH présente des difficultés d’apprentissage, souvent associées à des troubles du langage. Près de 25 % des enfants TDAH rencontrent des difficultés à lire et à écrire. La prévalence de la dyslexie est plus fréquente – 25 % – que dans la population générale – 6 %. La mémoire de travail leur fait défaut pour résoudre les problèmes, apprendre ce qui est dit en cours ou encore prendre des notes. Toute activité qui demande un certain type de planification leur pose problème. Cette lenteur pour traiter les informations est un handicap dans le domaine scolaire comme dans leur vie personnelle.

Malheureusement, les enfants concernés par ce trouble du neuro-développement pâtissent d’un déficit de prise en charge par une équipe pluridisciplinaire, à l’hôpital comme en libéral. La pénurie de professionnels, notamment d’orthophonistes, retarde l’établissement d’un diagnostic, hypothéquant une prise en charge précoce. Madame la secrétaire d’État, je réitère l’exigence de supprimer le numerus clausus pour les orthophonistes, appelé pudiquement « quota » !

Les centres médico-psychologiques comme les centres médico-psycho-pédagogiques ne sont pas davantage en capacité d’organiser les actions de prévention, de diagnostic et de soins par manque de moyens financiers et humains. La pédopsychiatrie est sinistrée, on ne cesse de la dire, mais rien ne se passe !

En outre, à l’instar des groupements hospitaliers de territoire (GHT), ces centres connaissent eux aussi des fusions, ce qui éloigne les populations des lieux de soins et ne raccourcit pas les délais d’attente, tant s’en faut.

S’il est nécessaire de mettre en place non seulement des rééducations en orthophonie, en psychomotricité ou encore en ergothérapie, souvent également des psychothérapies, il faut aussi renforcer la formation des équipes enseignantes et des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sur les troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.

Je profite de ce débat pour me faire l’écho du mal-être de ces AESH, qui se mobilisent pour de meilleures conditions de travail et de salaire. Comme vous le savez, il s’agit majoritairement de femmes en grande précarité, qui subissent des contrats à durée déterminée pendant des années, ce qui a pour première conséquence des salaires particulièrement bas – je parle ici de 800 euros. À ces salaires de misère s’ajoute une dégradation de la qualité du suivi des enfants, puisque, depuis l’instauration des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL), les AESH accompagnent de plus en plus d’élèves !

Madame la secrétaire d’État, avez-vous l’intention de revaloriser ce métier et d’accorder le statut de fonctionnaire aux AESH qui exercent leur métier depuis des années ?

J’en viens à la prise en charge des dépenses de santé. Le 21 mai dernier, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) a adopté, à l’unanimité, une motion appelant l’État à mieux prendre en compte les restes à charge que les personnes handicapées doivent acquitter.

Comme vous le savez, de nombreux frais amputent le pouvoir d’achat des TDAH, ainsi que celui de leurs familles, en dépit du respect des protocoles de soins. Nous considérons que les dépenses de santé doivent être prises en charge intégralement par l’assurance maladie afin de garantir l’accès aux soins, y compris pour ceux qui n’ont pas d’assurance santé. C’est vrai pour les enfants, mais également pour les adultes atteints de TDAH.

À ce propos, madame la secrétaire d’État, je souhaite vous sensibiliser à au moins deux des revendications de la Coordination nationale TDAH Adultes, le temps m’étant compté.

Êtes-vous prête à prendre des mesures permettant la reconnaissance du TDAH en affection longue durée ?

Êtes-vous prête à mettre en place une formation des professionnels de santé spécialisée dans le diagnostic et le traitement du TDAH de l’adulte, en particulier en psychiatrie, en addictologie, en milieu carcéral et en neurologie ?

En conclusion, madame la secrétaire d’État, il me semble essentiel de financer la recherche pour étudier les effets à long terme de l’utilisation de la Ritaline, traitement miracle pour certains et dangereux pour d’autres.

En tout cas, ce débat est important et je me réjouis qu’il ait lieu.

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