« Hyperactifs » : c’est souvent le terme employé, même s’il est réducteur, pour désigner les enfants qui sont quelque peu turbulents, parfois distraits, ou qui peinent à maintenir leur attention ; un terme trop souvent utilisé à tort ou à raison, sans bien savoir à quelle pathologie il renvoie ni comprendre les implications que cela entraîne pour des enfants et leurs familles. Derrière ce mot pluriel se cache un parcours du combattant singulier.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la réalité est pourtant plus complexe et le débat que nous avons aujourd’hui dans notre hémicycle permettra, en partie, d’y répondre, à tout le moins d’envoyer un signal fort à ces milliers de personnes souffrant parfois en silence d’un manque de reconnaissance : vous n’êtes pas seuls.
Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité est encore largement méconnu. Il l’est chez les enfants, il l’est encore plus chez les adultes. Il est méconnu, puisque toute la difficulté réside dans le repérage et le diagnostic du TDAH.
Ainsi, l’association TDAH France rappelle que le diagnostic du TDAH ne s’appuie pas sur un examen simple – une prise de sang, par exemple –, permettant de trancher de manière catégorique. C’est bien plus complexe : c’est la persistance des symptômes au fil du temps, leur présence dans différents environnements et leur retentissement au quotidien qui caractérisent ce trouble.
La Haute Autorité de santé précise qu’il s’agit d’un trouble, d’un syndrome associant trois symptômes, dont l’intensité varie selon la personne.
Au déficit d’attention sont associées une hyperactivité motrice, qui se manifeste souvent par une agitation intense ou par l’incapacité à rester en place, ainsi qu’une impulsivité, c’est-à-dire une difficulté à attendre, le besoin d’agir ou la tendance à interrompre les activités des autres.
Le TDAH toucherait ainsi 2 millions de personnes, dont 800 000 enfants. Il concerne 3 % à 5 % des enfants scolarisés et peut être une source de souffrance, car il engendre souvent des difficultés et une frustration.
Le repérage et la prise en charge effective sont donc deux éléments fondamentaux et indissociables pour permettre aux enfants et aux adultes d’appréhender ce trouble et d’atténuer ses effets sur leur vie quotidienne.
Agir plus précocement auprès des enfants constitue un enjeu majeur, puisqu’un retard de diagnostic et une absence de prise en charge peuvent avoir des conséquences dommageables.
Sur le plan psychologique, tout d’abord, puisque l’enfant qui n’arrive pas à se concentrer ou à terminer une tâche peut perdre confiance en lui et se refermer sur lui-même.
Sur le plan scolaire, ensuite, avec des redoublements plus fréquents, alors même qu’un accompagnement personnalisé permettrait un épanouissement scolaire des enfants atteints de TDAH.
Sur le plan familial, aussi, puisque les parents ne sauront comment comprendre et appréhender l’attitude de leur enfant, engendrant ainsi des situations de conflits.
Sur le plan social, enfin, les enfants atteints d’un TDAH ayant parfois plus de difficultés relationnelles.
Ce retard de diagnostic et l’absence de prise en charge peuvent ainsi avoir des conséquences sur la vie entière de la personne, notamment en matière d’accès à l’emploi ou d’insertion sociale.
Construire une société toujours plus inclusive reste la priorité du Gouvernement et de la majorité présidentielle.
C’est pourquoi, dès 2018, le Gouvernement a lancé la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement, qui a permis des avancées concrètes, notamment dans le champ du repérage, grâce à la mise en place d’un parcours de bilans et d’interventions précoces.
Celui-ci permet de poser un diagnostic précis, avant 7 ans, en associant médecin traitant, médecin de crèche ou de PMI, médecin scolaire, psychologues et psychomotriciens. Il vise par ailleurs à éviter toute avance de frais par la famille.
Les plateformes de coordination et d’orientation permettent de guider l’ensemble des personnes susceptibles de présenter des troubles du neuro-développement.
Vous avez souhaité, madame la secrétaire d’État, élargir ces plateformes aux 7-12 ans, ce qui permet de répondre plus précisément aux besoins des enfants, puisque nous savons désormais que l’école élémentaire tend à rendre plus visibles les signes évocateurs du TDAH.
Il s’agit d’une mesure forte, qui permettra d’améliorer le quotidien des enfants et des familles : 9 millions d’euros seront consacrés au renforcement de ces plateformes afin d’accélérer encore les démarches de diagnostic.
Vous avez par ailleurs publié lundi un livret pédagogique à destination des professionnels et des parents. Celui-ci permettra d’aboutir à un repérage précoce des écarts inhabituels de développement chez les enfants âgés de 0 à 3 ans, d’identifier les besoins spécifiques de l’enfant et de mieux orienter les parents, qui, parfois, se sentent démunis et peu accompagnés.
En quelques minutes, je viens de citer de multiples avancées concrètes qui permettent d’assurer une prise en charge exhaustive et facilitée des personnes atteintes de TDAH. Il est essentiel de poursuivre ces efforts, madame la secrétaire d’État.
Je me réjouis donc de la tenue de ce débat au sein de notre hémicycle, même si j’aurais préféré que nous discutions d’une proposition de loi. Je remercie d’ailleurs nos collègues, Mmes Guidez et Jacquemet, ainsi que le groupe Union Centriste, de nous donner l’occasion de mettre en lumière ce sujet essentiel.
Mes chers collègues, nous avons tous reçu d’innombrables témoignages de familles touchées par le TDAH. Certains ont dans leur entourage des enfants atteints de ce trouble ; il s’agit parfois de leurs propres enfants. Ce débat revêt donc une importance cruciale. Il s’agit d’un sujet de société qui a des effets sur le quotidien de très nombreux enfants dans notre pays. Ce trouble a des répercussions lourdes pour eux et leurs familles.
La formation du personnel éducatif et des professionnels de la petite enfance joue un rôle majeur. Vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État : il est essentiel d’agir le plus tôt possible pour garantir une prise en charge effective des enfants.
Il est également nécessaire de mieux sensibiliser la société tout entière au TDAH. Ce débat permettra, je l’espère, de démontrer notre implication en faveur d’une meilleure reconnaissance de ces troubles.
À cet égard, la journée nationale des TDAH, dont la première édition s’est tenue le 12 janvier 2021, et qui aura désormais lieu chaque année, permettra d’éveiller les consciences et de changer le regard sur ces troubles.
« Hyperactifs » doit être plus qu’un terme lancé parfois aux détours des conversations ; c’est une réalité qui nécessite tout notre engagement pour améliorer le diagnostic, l’accès aux soins et l’accompagnement de tous.