Intervention de André Gattolin

Réunion du 1er février 2022 à 14h30
Menaces que les théories du wokisme font peser sur l'université l'enseignement supérieur et les libertés académiques — Débat organisé à la demande du groupe les républicains

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Le champ scientifique est un lieu structuré de production, de validation et de circulation des savoirs, dans le respect du pluralisme. Il peut – et il doit – exister des controverses dans le monde académique. Elles s’expriment selon les règles précises du débat contradictoire et argumenté.

Dans tous les domaines de la science, y compris naturellement dans le domaine des sciences humaines et sociales, la liberté académique est consubstantielle à la liberté de recherche.

Elle est aussi consubstantielle à la liberté d’enseigner, pour peu que cet enseignement respecte les règles de l’art, c’est-à-dire admette l’existence et l’expression des thèses opposées à celles développées par l’enseignant ou par le chercheur. Cela signifie que la liberté académique s’accompagne d’une nécessaire responsabilité académique, dont le fondement d’ailleurs le plus connu est, pour le chercheur, « l’intégrité scientifique » et, pour l’établissement universitaire, la mise en œuvre du principe de respect du pluralisme des idées et des enseignements.

L’existence d’une pensée critique, c’est-à-dire d’une pensée divergente et étayée face à la pensée majoritaire ou dominante, est tout sauf incompatible avec une culture académique démocratique. Sans elle, pas de controverse de Valladolid et des générations de Galilée forcées de se défausser !

Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas un thuriféraire de Pierre Bourdieu, mais je dois admettre qu’il disait juste lorsqu’il écrivait qu’« un champ scientifique authentique est un espace où les chercheurs s’accordent sur des terrains de désaccord et sur les instruments avec lesquels ils sont en mesure de résoudre ces désaccords, et sur rien d’autre ».

Le problème se pose lorsque, à côté – ou parfois au-delà – des écoles de pensée critique se développe une « pensée dénonciatrice », agressive, menaçante, qui ne respecte pas les règles académiques exprimées précédemment.

Cette pensée dénonciatrice, qu’elle nous plaise ou non, relève du débat d’idées ou du débat public et de rien d’autre. Elle doit cependant respecter la loi et les principes posés par l’État de droit.

S’il fait vivre la démocratie, le débat d’idées n’est pas régi par les règles académiques. C’est pour cela qu’il peut parfois provoquer l’hystérie et les passions tristes ; c’est pour cela, aussi, que nous avons besoin de la rigueur de la recherche académique.

Le wokisme jouit-il aujourd’hui d’une véritable résonance dans les travaux de recherche qui sont menés en France ? Moi-même enseignant, je me suis renseigné à ce sujet et j’ai trouvé peu d’éléments de réponse.

Madame la secrétaire d’État, au-delà du terme fourre-tout, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pourrait-il tenter, par l’analyse des travaux de thèse ou de doctorat engagés, de dresser un véritable état des lieux de l’existence de tel ou tel courant, les phénomènes de mode touchant également le monde universitaire ?

1 commentaire :

Le 20/05/2022 à 11:10, aristide a dit :

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"S’il fait vivre la démocratie, le débat d’idées n’est pas régi par les règles académiques. "

C'est une foire d'empoigne pour gens désœuvrés et en voie de rupture sociale...

Le problème, c'est qu'il ne peut y avoir de démocratie sans débat d'idées, avec tous les risques de mauvaise foi et de populisme que cela peut créer.

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