Deux ans et cinq mois : c’est le temps qu’il aura fallu au Gouvernement pour prendre l’ordonnance n° 2021-611 du 19 mai 2021 relative aux services aux familles, une période pendant laquelle le Parlement a été dépossédé d’un sujet pourtant peu technique et qui intéresse le Sénat au titre des compétences dont disposent les collectivités territoriales sur les modes d’accueil de la petite enfance.
Rappelons que cette ordonnance a été prise sur le fondement de l’article 99 de la loi 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP.
Cette habilitation du Gouvernement par la loi ASAP, pour une durée de six mois à compter de la promulgation de la loi, résulte de l’incapacité du Gouvernement à publier l’ordonnance dans le délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, dont l’article 50 prévoyait déjà une habilitation.
Au-delà de la question du délai de publication, cette ordonnance s’est caractérisée par une forme d’habilitation rechargeable, prise à titre conservatoire ou de précaution, que nous voyons malheureusement trop souvent.
L’étude d’impact de la loi ASAP indiquait qu’un projet d’ordonnance avait été établi dès l’automne 2019, mais que des concertations avaient mis en évidence le besoin de prendre des dispositions complémentaires.
Selon les termes de cette étude d’impact, il apparaissait « opportun de laisser la possibilité de compléter le projet d’ordonnance préparé en 2019 par d’autres mesures d’ordre législatif qui pourraient être proposées à l’issue de la réflexion lancée à la demande du président sur les “mille premiers jours” et au terme de la mission en cours de l’Inspection générale des affaires sociales sur l’évolution des missions des services de la protection maternelle et infantile en matière d’accueil du jeune enfant. »
L’habilitation retenue dans la loi ASAP est donc plus large que celle de la loi Essoc. Le Sénat avait supprimé tant l’article 50 de la loi Essoc que l’article 99 de la loi ASAP en première lecture. Force est de constater que la suite des événements lui a donné raison.