Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 1er février 2022 à 14h30
Débat sur le suivi des ordonnances — Débat interactif

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Je vais poursuivre dans la même veine et, à mon tour, rappeler brièvement les chiffres : sous le quinquennat Macron, 345 habilitations par ordonnances ont été accordées, et ce nombre a doublé en dix ans – sans doute est-ce d’ailleurs sur ce doublement qu’il faut insister… La part d’ordonnances ratifiées est, elle, en chute libre, atteignant un taux de 20 % sur le quinquennat. Cela doit aussi nous alerter.

Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, la décision du Conseil constitutionnel du 3 juillet 2020, précisant qu’une ordonnance non ratifiée avait valeur législative, est venue jeter le trouble. On peine encore à comprendre cette décision, qui entre en conflit avec le deuxième alinéa de l’article 38 de la Constitution, selon lequel les ordonnances « ne peuvent être ratifiées que de manière expresse ».

Le Conseil d’État conteste explicitement cette jurisprudence et se considère comme compétent pour juger d’une ordonnance non ratifiée. Le Sénat la conteste également. Il faut dire que cette décision achève de priver le Parlement de son pouvoir législatif.

La législation déléguée a été mise en œuvre pour faire face à l’instabilité gouvernementale des IIIe et IVe Républiques et au besoin d’accélérer les temps parlementaires, dans un contexte de révolution industrielle, de mondialisation et d’évolution de la société.

Quand la Constitution de la Ve République est venue encadrer cette pratique, jamais ses rédacteurs n’imaginaient qu’un gouvernement puisse disposer d’une majorité nette et fidèle à l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, la conjugaison du fait majoritaire et de la rationalisation du parlementarisme réduit la Représentation au rang de faire-valoir et la prive donc de son rôle de législateur. L’actuel gouvernement innove en la matière, en ne faisant même plus semblant de mettre les formes.

Comment, monsieur le ministre, expliquez-vous un tel recours aux ordonnances et l’abandon des procédures de ratification ?

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