Cela a déjà été dit, le recours aux ordonnances a dangereusement augmenté. Je ne ferai que répéter les chiffres : pas moins de 345 habilitations depuis 2017, soit une hausse de 106 % par rapport au quinquennat de Nicolas Sarkozy et de 6 % par rapport à celui de François Hollande ; en parallèle, seulement 20 % d’ordonnances ratifiées, contre 60 % et 80 % pour les prédécesseurs de l’actuel Président de la République.
J’ai bien entendu vos réponses, monsieur le ministre, mais je crois que, même en dehors du motif du covid, et pour reprendre les termes du rapport sénatorial, nous nous situons toujours à un « niveau exceptionnel ».
L’usage débridé de cet outil, combiné à la récente jurisprudence du Conseil constitutionnel, devient forcément source d’inquiétudes.
Ainsi, allant à l’encontre de la révision constitutionnelle de 2008, qui impose une ratification expresse des ordonnances, les juges ont considéré qu’il n’était pas nécessaire que celles-ci soient ratifiées pour obtenir valeur législative, une fois qu’est passé le délai d’habilitation, exonérant ainsi le Gouvernement d’un examen devant le Parlement.
Les inquiétudes sont d’autant plus grandes qu’un récent article du journal Marianne, faisant état du programme d’un futur candidat potentiel, actuellement Président de la République, précisait que l’objectif était de réduire le travail législatif et le temps consacré à l’examen des textes de loi…
On voit bien là comment l’exécutif pourrait s’engouffrer dans la brèche de l’évitement du débat démocratique, piétinant la légitimité du travail parlementaire. Finalement, la verticalité du pouvoir se renforce jour après jour.
Nous aimerions donc connaître la position du Gouvernement sur la question de la ratification expresse des ordonnances et savoir s’il souhaite aller plus loin dans le transfert du pouvoir législatif vers le pouvoir exécutif, avec un Parlement qui n’écrirait plus la loi.