Intervention de Annick Billon

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 27 mai 2022 : 1ère réunion
Audition de Mme Carole Bienaimé besse membre de l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique arcom

Photo de Annick BillonAnnick Billon, présidente, co-rapporteure :

Mes chers collègues, nous avons décidé de travailler au premier semestre 2022 sur le thème de la pornographie. Nous nous pencherons à la fois sur le fonctionnement et les pratiques de cette industrie, les conditions de tournage, les représentations des femmes et des sexualités véhiculées, ainsi que sur l'accès de plus en plus précoce des mineurs aux contenus pornographiques et ses conséquences en matière d'éducation à la sexualité.

La presse s'est récemment fait l'écho de graves dérives dans le milieu pornographique, avec des pratiques de plus en plus violentes et dégradantes et des mises en examen pour viols de plusieurs acteurs et producteurs. Ces faits nous ont confortés dans notre choix de cette thématique de travail.

Quatre rapporteures ont été désignées pour mener ces travaux : Alexandra Borchio Fontimp, Laurence Cohen, Laurence Rossignol et moi-même.

Je précise que cette réunion fait l'objet d'un enregistrement vidéo accessible en ce moment même sur le site Internet du Sénat, sur son compte Twitter puis en VOD.

D'après les chiffres récents dont nous disposons, on dénombre en France environ vingt millions de visiteurs uniques de sites pornographiques par mois. En outre, 80 % des mineurs ont déjà vu des contenus pornographiques, et à 12 ans, près d'un enfant sur trois a déjà été exposé à de telles images.

C'est précisément sur le sujet de l'accès des mineurs aux sites pornographiques que porte aujourd'hui notre audition. Nous accueillons en effet Carole Bienaimé Besse, membre du collège de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, l'Arcom, née le 1er janvier 2022 de la fusion du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi).

Madame Bienaimé Besse, vous présidez au sein de l'Arcom le groupe de travail « Éducation, protection des publics et cohésion sociale ». Vous êtes à ce titre en charge du suivi du dossier de l'accès des mineurs aux sites pornographiques.

Peut-être pourriez-vous dans un premier temps nous rappeler les compétences historiques du CSA en matière de contrôle de l'accès des mineurs à la pornographie, lorsque ce contrôle s'exerçait essentiellement sur la diffusion de films pornographiques à la télévision, avant la diffusion de masse de la pornographie sur Internet.

En matière de contrôle de l'interdiction d'accès des mineurs à la pornographie, l'Arcom exerce aujourd'hui des compétences en amont et en aval. En amont, il s'agit notamment de mener des actions pour que les dispositifs de contrôle parental soient mieux connus, installés et activés. Nos collègues de l'Assemblée nationale ont d'ailleurs adopté la semaine dernière une proposition de loi visant à obliger les fabricants d'appareils connectés à inclure un contrôle parental gratuit et facile d'utilisation. En aval, il s'agit aujourd'hui de faire appliquer les dispositions de la loi du 30 juillet 2020, qui, grâce à un amendement de notre collègue Marie Mercier, oblige les sites pornographiques à mettre en place des systèmes efficaces de blocage de leur accès aux mineurs.

La loi du 30 juillet 2020 autorise en effet le CSA, aujourd'hui Arcom, à contrôler le fait qu'un site a bien mis en oeuvre une solution technique satisfaisante, qui va au-delà de la simple déclaration d'âge. En outre, le président de l'Autorité peut saisir la justice pour obtenir le blocage complet d'accès des sites qui auraient ignoré son injonction.

Cette procédure de mise en demeure a été appliquée pour la première fois en décembre dernier, lorsque le CSA a demandé à cinq sites de mettre en place un contrôle d'âge plus robuste et plus fiable. Ces cinq sites sont aujourd'hui menacés d'un blocage judiciaire si aucune solution technique satisfaisante n'est trouvée.

Pourriez-vous nous dire où en est aujourd'hui la procédure, et quels sont vos échanges à ce sujet avec les cinq sites concernés ? Quels sont les obstacles techniques et juridiques à la mise en place de systèmes efficaces de vérification d'âge et de blocage de l'accès aux mineurs ?

Notre délégation a auditionné la semaine dernière plusieurs associations féministes engagées dans la lutte contre la pornographie, dont Osez le féminisme ! qui s'est par ailleurs constituée partie civile dans le procès dit « du porno français », pour lequel on recense aujourd'hui une cinquantaine de victimes, avec des plaintes pour viol, proxénétisme et traite des êtres humains. Sa porte-parole, Céline Piques, nous a indiqué avoir fourni au CSA une liste de 118 sites qui devraient pouvoir faire l'objet d'une mise en demeure au même titre que les cinq déjà visés par votre autorité, et dont l'accès aux contenus devrait pouvoir être bloqué conformément à la loi en vigueur. Quelles seront les suites données par l'Arcom au signalement de ces 118 sites pornographiques ?

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