Madame Filleul, la situation du réseau dans la région Hauts-de-France est très mauvaise. Un besoin de travaux se fait sentir et le contrat de performance ne semble pas apporter de réponse suffisante. Je ne suis pas très optimiste quant à l'amélioration à court terme de la qualité du réseau, et donc de service, non pas pour les lignes structurantes, mais pour les lignes de desserte régionales, notamment dans le sud de la région. C'est la conséquence du retard d'investissements accumulé pendant 20 ans, qu'il est difficile de rattraper.
La région a eu le mérite d'être en pointe sur l'ouverture à la concurrence : elle a eu à affronter en premier la SNCF pour lui demander de lui fournir toutes les informations afin de pouvoir rédiger ses appels d'offres. La SNCF n'a pas répondu à ces demandes, que ce soit d'une manière volontaire, ou simplement parce qu'elle n'en avait pas les moyens en raison du découpage des lignes proposé. La région a alors saisi l'ART pour parvenir à un règlement du différend, car l'autorité dispose d'un pouvoir de sanction. Nous avons, dans une décision très détaillée, mis en demeure la SNCF de fournir les informations. La SNCF ne l'a pas fait et a déposé deux recours devant la Cour d'appel de Paris. Celui en référé a été rejeté. Celui au fond sera jugé en mars, mais les conclusions de l'avocat général vont dans le sens de notre position. Ce conflit a conduit la région à retarder d'un an l'ouverture à la concurrence, afin de permettre aux concurrents de répondre correctement aux appels d'offres. Bientôt, en mars, une jurisprudence existera. L'action de la région Sud a permis, quant à elle, de clarifier les règles concernant les transferts de personnels : la proposition de la SNCF relative au transfert d'ETP pour les lots ouverts à la concurrence était 35 % supérieure à notre estimation. Le recours a conforté la position de l'ART. Ces conflits permettent de bâtir une jurisprudence qui sera bénéfique à l'avenir.
Nous n'avons aucune compétence sur le canal Seine-Nord Europe, même si je partage à titre personnel votre analyse.
Monsieur Jacquin, en ce qui concerne la programmation des investissements, dans notre proposition d'avis, que j'adresserai à votre président cet après-midi, nous proposons qu'une liste des investissements très précise soit annexée au contrat de performance, avec les financements afférents. On ne peut pas annoncer, en effet, des investissements sans prévoir les financements : c'est contraire à l'esprit d'un contrat, et finalement cela contraint SNCF Réseau à réduire encore ses investissements. SNCF Réseau est incapable de porter ses investissements de 2,8 à 3,8 milliards en un an, mais c'est tout à fait possible si la hausse est progressive sur plusieurs années.
Monsieur Marchand, notre action constitue un signal pour la SNCF. Il faut encore attendre le jugement de la Cour d'appel. Si la SNCF ne fournit pas les éléments demandés, nous saisirons la commission des sanctions de l'ART. Les sanctions peuvent être très lourdes, pouvant aller jusqu'à 3 % du chiffre d'affaires de l'opérateur, 5 % en cas de récidive, voire l'interdiction de circuler sur le réseau. La commission, composée de magistrats, est indépendante du régulateur et jugera en droit.
M. Houllegatte, le transport combiné est l'un des grands perdants du manque de lisibilité et d'indicateurs. Sans un indicateur de bonus-malus, il est difficile de bien le faire fonctionner, car la différence entre le fret et le transport combiné, c'est que ce dernier a des horaires. Lorsqu'on livre un conteneur de primeurs par train, un camion l'attend sur le quai pour aller livrer les magasins dans la foulée. La ponctualité est donc essentielle, et nous avons besoin d'indicateurs très précis sur ce point.
Madame Préville, les péages sont les plus élevés en Europe, car le modèle français fait payer le coût complet de l'infrastructure par les utilisateurs. L'État contribue à hauteur de 2 milliards d'euros par le biais d'une redevance d'accès. Les péages rapportent 6 milliards d'euros, cela représente 90 % des recettes de SNCF Réseau, contre 40 ou 50 % dans d'autres pays. On peut faire payer cher des péages - c'est un choix - à condition qu'ils s'accompagnent d'un service de qualité, qu'ils soient répartis avec justice et qu'ils ne soient pas un frein au développement du rail et du nombre de trains - avec des péages deux fois moins chers, le nombre de trains pourrait être plus élevé.
Monsieur Dantec, tout ce que l'on peut faire dans le cadre du New Green Deal permettra d'avancer. Vous avez évoqué une piste. On pourrait mentionner aussi le train à hydrogène, mais nous n'en sommes qu'aux balbutiements et il ne faut pas attendre le New Green Deal pour avancer.