Trenitalia France est une filiale à 100 % de Trenitalia, le troisième plus important groupe ferroviaire d'Europe. Notre projet est né sur la base d'un développement continental. La France est l'un des plus importants marchés de l'Union européenne, avec plus de 90 milliards de voyageurs-kilomètres. De plus, les flux entre nos deux pays, qui sont voisins, sont importants.
En outre, le Gouvernement français poursuit une politique de transition écologique qui encourage les modes de transport vertueux comme le train. C'est pourquoi il nous est apparu fondamental de réaliser ce projet de liaison à grande vitesse. Depuis le 18 décembre, nous proposons deux allers-retours Paris-Milan et prochainement une nouvelle offre sur le tronçon Paris-Lyon.
Nous l'avons développé depuis quelques années. La crise de la covid a ralenti une partie des activités mais nous y sommes parvenus.
Nous avons pour objectif d'être complémentaires de l'opérateur historique, la SNCF. Nous sommes convaincus d'être entrés dans une logique de développement du marché ferroviaire, car nous avons vécu une expérience similaire en Italie.
À partir de 2012, un nouvel opérateur est arrivé sur le marché de la grande vitesse. Après trois à quatre ans, sur un axe majeur comme Rome-Milan, nous avons observé une augmentation des volumes de l'ordre de 90 %, une réduction des prix d'environ 30 % et une amélioration significative de la qualité de services.
C'est dans cet esprit que nous avons proposé notre offre commerciale en France, afin d'offrir un service complémentaire différent de l'offre actuelle. Nous sommes convaincus que plus d'offre ferroviaire donne la possibilité de faire grandir le marché ferroviaire.
En ce qui concerne les points positifs, nous avons obtenu de très bonnes appréciations de nos voyageurs depuis le 18 décembre. Ils apprécient le confort, la qualité du service et le très bon rapport qualité-prix de notre offre.
Plus que des points négatifs, j'évoquerais des améliorations possibles afin de favoriser l'ouverture à la concurrence et la croissance du marché ferroviaire. Elles sont à mon sens au nombre de trois.
D'abord, d'un point de vue technique, la principale difficulté tient aux différences entre les caractéristiques techniques des infrastructures des différents pays. L'importance des investissements requis par l'homologation et l'attestation de compatibilité compliquent l'accès aux infrastructures françaises. Nous souhaiterions par exemple que SNCF Réseau accélère le plan d'investissement dans l'ERTMS (European Rail Traffic Management System), afin de moderniser les systèmes de signalisation.
Il existe également une problématique liée au modèle économique. Les différences entre les coûts des péages en France et en Italie sont importantes. Par exemple, sur le tronçon Paris-Lyon, le péage varie de 26 à 39 euros par train-kilomètre, alors qu'en Italie, sur un tronçon similaire comme le Rome-Milan, il s'établit entre 6 et 8 euros par train-kilomètre. Les systèmes sont certes différents, en ce qui concerne notamment la contribution de l'État, mais l'ouverture à la concurrence a surtout permis de réduire les prix et d'augmenter l'offre ferroviaire. Il serait souhaitable que la France suive la même voie, afin d'agrandir le marché et d'encourager les voyageurs à emprunter un mode de transport plus écologique.
S'agissant des compétences, nous payons le fait d'avoir été les premiers à entrer sur le marché ferroviaire français, et plus précisément sur l'open access. Nous avons donc éprouvé plus de difficultés à trouver des compétences spécifiques (conducteurs, agents de bord, spécialistes de la sécurité ferroviaire). La création de centres de formation permettrait de disposer de davantage de ressources humaines, en particulier des jeunes.
Comme le soulignait Alexandra Debaisieux, la disponibilité du matériel pose également une difficulté. Cela étant, le secteur ferroviaire nécessite des investissements considérables et nous avons surmonté ce problème car nous sommes un grand groupe. Évidemment, pour les petites entreprises, la situation est plus compliquée.
S'agissant des rapports avec la SNCF, ils sont pour l'instant positifs. Nous collaborons avec SNCF Réseau et SNCF Voyageurs, sinon nous n'aurions pas pu lancer notre offre. Seuls des problèmes résident encore dans la définition des sillons, à cause des travaux en cours, par exemple sur la ligne Lyon-Modane.
Pour le reste, nous avons accès aux ateliers de maintenance. Je ne peux honnêtement pas formuler de remarques négatives.