Intervention de Geneviève Darrieussecq

Réunion du 15 février 2022 à 14h30
Sécurité de la coupe du monde de football de 2022 au qatar — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Geneviève Darrieussecq :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureuse de présenter aujourd’hui devant vous le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’État du Qatar établissant un partenariat relatif à la sécurité de la Coupe du monde de football de 2022, signé à Doha le 5 mars 2021.

La France entretient avec le Qatar un partenariat stratégique qui couvre tous les domaines de coopération. Des relations solides se sont nouées entre nos deux pays dans les domaines de la défense, de la sécurité, de l’économie et des investissements, de la culture, de l’éducation et du sport.

Je souhaite souligner plus particulièrement aujourd’hui l’importance du partenariat que nous avons établi dans le domaine de la sécurité des grands événements sportifs, axe fort de notre coopération bilatérale avec le Qatar. Inauguré à l’occasion des jeux Asiatiques de 2006, ce partenariat s’est notamment approfondi avec l’organisation des championnats du monde de handball en 2015, de cyclisme en 2016 ou encore d’athlétisme en 2019.

Dans le cadre de cette relation de confiance, la France s’est engagée, en réponse à la demande des autorités qatariennes, à accompagner le Qatar dans la préparation et la conduite des actions destinées à assurer la sécurité de la Coupe du monde de football de 2022, qui se tiendra à Doha. Le Qatar sera le premier pays du monde arabe à accueillir cette compétition, du 21 novembre au 18 décembre prochains.

Dans ce contexte, le ministère de l’intérieur français propose d’apporter aux services qatariens une expertise de haut niveau, dans une offre dite « intégrée », afin de les accompagner dans la planification et la conduite de cette compétition. À cette fin, il peut s’appuyer en particulier sur la relation historique entre la gendarmerie nationale et la force de sécurité intérieure qatarienne qui a conduit à l’organisation de nombreuses actions de formation et d’exercices conjoints.

La richesse de la coopération entre la France et le Qatar dans le domaine de la sécurité s’est d’ailleurs illustrée par la mobilisation de plusieurs experts français à Doha, en fin d’année dernière, lors de la Coupe arabe des nations de football de 2021. Cette compétition a permis à la France d’affiner encore son offre sécuritaire et d’aider le Qatar à définir ses besoins en vue de l’organisation, en 2022, d’un événement de plus grande ampleur.

Je voudrais ajouter que ces échanges croisés, qui ont pour objectif principal d’accompagner les forces qatariennes avant et pendant la compétition, nous offrent également l’occasion de développer nos propres savoir-faire dans la perspective des grands événements sportifs que la France organisera ces deux prochaines années, à savoir la Coupe du monde de rugby, en 2023, et les jeux Olympiques et Paralympiques, en 2024.

Le présent accord s’inscrit ainsi dans la volonté d’offrir un cadre juridique protecteur aux experts français qui pourront être déployés pendant la préparation et le déroulement de cette compétition. Négocié par le ministère de l’intérieur français et le comité de sécurité qatarien en charge de l’organisation de cet événement sportif, cet accord vise à rendre possible le déploiement d’une assistance technique et opérationnelle.

Je me félicite qu’il constitue le premier instrument juridiquement contraignant signé entre la France et le Qatar dans le domaine de la sécurité intérieure. Les coopérations liées à de précédents grands événements sportifs n’avaient en effet jamais donné lieu à une formalisation juridique spécifique, dans la mesure où elles revêtaient un caractère essentiellement technique et restaient d’une ampleur plus modeste. Le présent accord pourra donc offrir une référence pour l’avenir et contribuer à encourager la partie qatarienne à inscrire le développement de la coopération bilatérale dans un cadre juridique de long terme.

L’objectif de cet accord est double. Tout d’abord, il s’agit d’accompagner le Qatar dans l’organisation et la gestion de la sécurité de la Coupe du monde dans les meilleures conditions. La France est ainsi en mesure de proposer une offre de coopération articulée autour de dix grandes fonctions : planification, contre-terrorisme, gestion de l’ordre public, renseignement et anticipation, sécurité des installations, sécurité des mobilités, moyens spéciaux terrestres, moyens aériens, cybersécurité et sécurité civile.

Ensuite, il nous est apparu essentiel de sécuriser juridiquement le déploiement d’experts destinés à apporter une assistance technique et opérationnelle aux autorités qatariennes dans le cadre de l’organisation de cet événement majeur. En effet, en l’absence d’accord, le personnel français déployé sur le territoire qatarien aurait été soumis au droit local, donc exposé à des risques. Le présent accord crée ainsi des garanties équivalentes à celles qu’un accord de statut des forces à l’étranger, ou Status of Forces Agreement (SOFA), procure pour une coopération de défense. Je tiens à préciser que le SOFA entre la France et le Qatar fait actuellement l’objet d’une procédure d’approbation distincte et sera examiné prochainement par la Haute Assemblée.

Rédigé sur la base de la réciprocité et s’inspirant des clauses classiques figurant dans les accords de statut des forces signés par la France, l’accord aujourd’hui soumis à votre examen détermine le statut juridique et les conditions de séjour des personnels français déployés au Qatar et des personnels qatariens déployés en France dans le cadre d’activités de coopération en matière de sécurité.

Les experts déployés sont tenus au respect de la législation de la partie d’accueil et ne sont autorisés à pénétrer sur son territoire qu’avec son consentement préalable.

En matière de dépenses, l’essentiel de la charge liée aux actions de coopération incombe à la partie qui en bénéficie. Ainsi, la partie d’accueil paie les frais occasionnés par les activités de la partie d’envoi dans l’État d’accueil. En outre, la partie d’envoi peut importer et réexporter, en franchise de droits de douane et taxes, les matériels, équipements, véhicules et engins qui lui appartiennent et qui seraient engagés sur le territoire de la partie d’accueil dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord.

En matière pénale, l’accord prévoit un partage de juridiction.

Les infractions commises par un membre du personnel de la partie d’envoi relèvent en principe de la compétence des juridictions de la partie d’accueil. Toutefois, les autorités compétentes de la partie d’envoi exercent prioritairement leur juridiction lorsque l’infraction a été accomplie dans le cadre du service, ou lorsqu’il a été porté atteinte aux biens ou à la sécurité de la seule partie d’envoi ou de son personnel.

En cas de poursuites devant les juridictions de la partie d’accueil, la personne concernée bénéficie des garanties relatives au droit à un procès équitable, et en particulier du droit à être jugée dans un délai raisonnable, à être représentée ou assistée, à bénéficier des services d’un interprète, à communiquer avec un représentant de son ambassade, à être informée des accusations portées contre elle, à être confrontée aux témoins à charge et à se voir appliquer le principe de non-rétroactivité de la loi pénale.

Si les poursuites intentées aboutissent à une condamnation dans l’État d’accueil, l’accord prévoit que ce dernier examinera avec bienveillance les demandes tendant à permettre à la personne condamnée de purger sa peine dans l’État d’envoi.

Si dans l’État qui exerce sa juridiction une infraction est punie de la peine de mort ou d’une peine contraire aux engagements résultant des conventions internationales auxquelles adhère l’autre État, ce dernier ne remettra au premier État une personne faisant l’objet de poursuites que contre l’assurance que de telles peines ne seront ni requises ni prononcées ou, si elles sont prononcées, qu’elles ne seront pas exécutées.

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