Je félicite les trois rapporteurs pour ce bilan complet. Les réformes ont été riches dans ce mandat en matière d'éducation. Le ministre a voulu, si ce n'est bouger les lignes, au moins imprimer sa marque. Il a fonctionné par totems : la scolarisation dès trois ans ou encore les PIAL et la mutualisation de la prise en charge des enfants en situation de handicap. C'est un moyen de faire disparaître les classes spécialisées, comme les ULIS (unités localisées pour l'inclusion scolaires), qui n'ont pas bonne presse. Les réformes du baccalauréat et du lycée sont aussi un totem.
Enfin, je souhaite mentionner deux propositions de loi majeures du quinquennat : la fonction des directeurs d'école, un sujet important identifié par le Sénat avant la crise de la Covid, ainsi que la proposition de loi de Françoise Gatel sur les écoles hors contrat. Nous avons voulu permettre à la République d'avoir un oeil efficace sur les écoles hors contrat.
À partir de ces totems, le ministre a fait des choix caricaturaux, et souvent n'abordant pas la thématique de façon globale. Je pense à la question de l'orientation qui n'a pas été traitée, malgré le bouleversement majeur qu'ont entrainé les réformes du lycée et du baccalauréat. Nous avions alerté sur un risque de création des inégalités. Cela s'est réalisé : faire un choix éclairé pour un élève ne se décrète pas. Un jeune arrive avec son bagage culturel, social, territorial. Il a besoin d'un service public de l'orientation.
En ce qui concerne le métier d'enseignant, les ambigüités sont nombreuses. Les classes à 25 élèves sont dans les faits une moyenne. Il existe encore en France des classes à plus de 25 élèves. On ne peut pas fonctionner avec des moyennes : chaque élève est unique. Je comprends qu'il faille des stratégies générales en matière éducative et de ressources humaines. Néanmoins, j'ai l'impression que les services de l'éducation nationale travaillent à partir d'une vision d'un gros établissement ou école, avec beaucoup d'effectifs, plutôt urbains. Je n'ai pas le sentiment, dans les mesures du ministre, d'une prise en compte de l'école rurale ou du petit établissement. En dehors de l'enseignement supérieur et des écoles de grande taille, n'y aurait-il point de salut ?
Il y a eu de nombreuses annonces sur l'enseignement professionnel, technique ou agricole. Mais dans les faits, ces enseignements n'ont pas été valorisés. Les inégalités se sont renforcées ou n'ont pas été traitées. Alors que le nombre d'académies concernées par la réforme de la réussite éducative va être élargi, aucune évaluation n'a été faite des premières expérimentations.
Enfin, il y a des ambiguïtés dans les réponses par un défaut d'évaluation, ou une évaluation qui ne va pas dans le détail. Or, ces évaluations détaillées sont possibles. J'en veux pour preuve celle réalisée en matière d'éducation artistique et culturelle. Il a été démontré qu'au final c'est l'école rurale qui réussit le mieux cette mission.
Les attentes étaient nombreuses au moment de la prise de fonction du ministre : des attentes de simplicité, de fluidité, d'humanité et de bienveillance dans le système éducatif. Les ambiguïtés sont restées, les inégalités ont été maintenues et la simplicité a été remplacée par une forme de simplisme dans les propos.