Intervention de Guy Benarroche

Réunion du 22 février 2022 à 15h15
Régulation du marché de l'art — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Guy BenarrocheGuy Benarroche :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le présent texte porte sur l’amélioration du système de régulation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, soit principalement des œuvres d’art, mais aussi toutes sortes d’objets mobiliers, y compris des machines industrielles et même des animaux, notamment des chevaux, comme l’a rappelé notre rapporteure.

Notre assemblée avait dès 2018 travaillé sur l’attractivité et la compétitivité juridique du marché de l’art français. En quelques décennies, le marché de l’art est devenu très concurrentiel.

Les opérateurs français des ventes volontaires ont ainsi dû s’adapter à un phénomène d’internationalisation qui a précipité le déclin de l’attractivité de la France, longtemps réticente aux évolutions. En parallèle d’un contexte concurrentiel international accru, les maisons de ventes doivent faire face à l’émergence du e-commerce et de sites d’annonces commerciales en ligne. Dans les années 1960, notre pays représentait encore 60 % du marché mondial de l’art ; il n’en représente plus que 6 % aujourd’hui.

Les raisons en sont multiples. Elles sont d’ordre artistique, fiscal et administratif. Lors des auditions de la commission, plusieurs pistes ont été proposées, notamment l’évolution du Conseil des ventes volontaires, certaines d’entre elles ayant été retenues par l’auteur du texte.

Le rapport remis en décembre 2018 à l’ancienne garde des sceaux, ministre de la justice, rédigé par Henriette Chaubon, conseillère honoraire à la Cour de cassation, et Édouard de Lamaze, avocat, ancien délégué interministériel aux professions libérales, comportait 41 propositions, dont sept concernaient la rénovation du CVV.

Aussi le présent texte a-t-il pour objet principal de réformer cette autorité de régulation. Il prévoit de transformer le CVV, dont sont actuellement les seuls membres deux commissaires-priseurs et deux suppléants.

Le grand mérite de ce texte est bien de renforcer la présence des professionnels du marché de l’art au sein de ce Conseil afin que ce dernier puisse faire le lien entre les artistes et les autorités de régulation, à l’image du ministère de la culture.

Ce Conseil aura ainsi, par exemple, un droit de regard sur l’activité d’acteurs étrangers à l’espace économique européen via une épreuve d’aptitude.

La modernisation attendue de cette autorité de régulation prend la forme d’une refonte en Conseil des maisons de vente, dont la composition limite les risques de conflits d’intérêts.

Nous saluons le fait que le pouvoir disciplinaire, qui devait initialement être confié au Conseil, ait été finalement transmis au tribunal judiciaire de Paris. Les justices ordinales dérivent parfois, dans un souci de maintien du statu quo, vers l’entre-soi. De plus, au vu du faible nombre de contentieux, et afin de prévenir au mieux l’apparition de conflits d’intérêts, il semble cohérent de remettre ce pouvoir au tribunal judiciaire de Paris et de ne pas faire de ce Conseil une instance ordinale. Son rôle doit être d’édicter et de promouvoir de bonnes pratiques et des obligations déontologiques.

Nous saluons également le transfert des missions de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme à la direction générale des douanes et droits indirects.

Enfin, ce texte permet une remise à plat et une grande simplification de l’environnement du marché de l’art.

Nous saluons à la fois la simplification des démarches, notamment la suppression de l’établissement d’un mandat de vente par écrit et d’un procès-verbal de la cession et le rétablissement d’une concurrence équitable entre notaires et autres vendeurs, et la volonté d’instaurer une formation continue pour les commissaires-priseurs.

Reste toujours la problématique des ventes non régulées en ligne et de la double exigence de protection des usagers, des acheteurs comme des vendeurs, et surtout de compétitivité du secteur. La transformation numérique du secteur et son encadrement demeurent un enjeu.

Ce texte, qui revient sur un libéralisme excessif, répond de manière assez technique aux difficultés d’un marché de l’art en proie à une crise d’attractivité dans notre pays.

Pour ma part, je me permettrai d’ouvrir de soulever la question de l’accompagnement de la création dans notre pays. Un marché de l’art ne peut vivre qu’avec un vivier bouillonnant de talents. Le secteur de la culture a été très affecté par la crise sanitaire. Le plan de relance n’est pas à la hauteur des enjeux dans une nation de culture ouverte à tous les artistes. Il ne permettra pas à ces derniers de s’affranchir des règles du marché.

Pour autant, au vu du travail de notre commission et compte tenu de l’équilibre atteint dans cette proposition de loi, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte.

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