Intervention de Pierre Laurent

Commission des affaires européennes — Réunion du 3 février 2022 à 9h05
Institutions européennes — Programme de travail de la commission européenne pour 2022 - proposition de résolution européenne et avis politique

Photo de Pierre LaurentPierre Laurent :

Merci pour ce travail et félicitations aux rapporteurs. Cela étant dit, je vais être assez direct : je ne voterai pas cet avis politique ni la PPRE et ce, pour des raisons de fond. Il s'agit d'approuver le programme de travail fixé par la Commission pour 2022. Or, je ne l'approuve pas. Tout le pilier de l'Europe social continue d'être l'Oublié et l'Impensé de la construction européenne. On aurait pu penser qu'après les crises successives - le Brexit, la pandémie mondiale - on inverserait les priorités. Ce n'est pas le cas ! La proposition de résolution continue de se féliciter de l'état actuel du socle européen des droit sociaux, qui n'est a fortiori pas complètement appliqué, comme ne le cesse de le répéter la Confédération européenne des syndicats depuis des années. On continue dans toute l'Europe de reculer l'âge de départ à la retraite, alors même que les conditions de vie des retraités se dégradent graduellement, que le taux de chômage des seniors est extrêmement important... On voit qu'il y a un immense problème en Europe sur l'autonomie et sa prise en charge - je vous renvoie au scandale actuel frappant la société ORPEA. La question du logement constitue également un problème majeur. Les problématiques sociales continuent d'être sous-estimées : elles ne sont prises en compte que par le prisme de l'amélioration de la compétitivité européenne. Cette conception de la société, qui fonde les politiques européennes depuis des années, est inadaptée pour traiter les enjeux de la crise qui frappe notre continent.

Concernant le Pacte vert, j'approuve l'objectif de réduction des émissions de carbone de 55 %. Cependant, il existe de nombreuses inconnues concernant la trajectoire que nous nous apprêtons à emprunter, et pas simplement sur le plan social. Le financement de cette nouvelle politique devrait se faire par le biais de ressources propres, dont on se félicite de la création sans en mesurer les conséquences réelles. Plus l'on voudra étendre le système d'échange de quotas d'émission pour compenser l'augmentation des objectifs de réduction carbone, et plus cet instrument risque d'être limité. Je ne pense pas que régler les problématiques qui se profilent par une logique de marché soit adapté. De surcroît, nous soulignons dans l'avis politique, et ce, à juste titre, que ces ressources propres ne suffiront pas à financer cette politique ambitieuse.

Un débat s'ouvre sur la révision du Pacte budgétaire. Or, notre PPRE se contente de « prendre note des débats en cours ». C'est un peu lacunaire : la révision du Pacte de stabilité et de croissance est cruciale. Le Parlement devrait se saisir dès maintenant de cette question. Autrement, nous interviendrons une fois de plus a posteriori, c'est à dire une fois que les arbitrages auront été réalisés.

Sur d'autres aspects, notre position est, me semble-t-il, quelque peu angélique. On continue de parler de la boussole stratégique alors que l'on voit bien avec ce qu'il se passe en Ukraine qu'on est face à d'immenses problèmes concernant l'OTAN. On parle également d'une relation renouvelée avec l'Afrique. Cette dimension ne me semble pas très développée dans notre PPRE, alors qu'il y aurait beaucoup à dire.

Ainsi, je n'approuverai pas ce programme de travail. Soyez rassurés, je ne boycotterai pas les débats et j'essaierai d'être constructif mais, je ne souscrirai pas à cette trajectoire générale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion