Intervention de Nadia Sollogoub

Réunion du 1er mars 2022 à 19h00
Décision de la russie de faire la guerre à l'ukraine — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Nadia SollogoubNadia Sollogoub :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, les couleurs de l’Ukraine sont le bleu d’un ciel d’azur sur l’or des champs d’une terre fertile. Nous pourrons désormais y ajouter la trace indélébile du sang versé par un peuple héroïque qui tente, heure par heure, de résister à l’invasion de l’armée russe.

Je vous parle ce soir avant tout en tant que citoyenne, une citoyenne française fière d’appartenir au continent européen. Je vous parle également en tant que présidente du groupe d’amitié France-Ukraine.

En temps normal, l’amitié entre deux pays doit être le terreau de relations culturelles, économiques, commerciales et bilatérales qui croissent et prospèrent. En temps de guerre, l’amitié entre deux pays, ce sont les angoisses, les nuits blanches, les colonnes de réfugiés, les nouvelles auxquelles on ne peut pas croire, le décompte des victimes et la douleur de l’impuissance.

Alors que d’immenses convois militaires convergent vers Kiev et que les missiles pleuvent sans cesse, l’urgence est d’obtenir une trêve, et une évacuation humanitaire.

Les civils, femmes et enfants essentiellement, tentent de fuir, malgré la dangerosité du voyage. Les routes sont exposées aux frappes aériennes, constatées à neuf kilomètres de la frontière polonaise, nous a-t-on dit hier au Quai d’Orsay.

Il y aurait eu ces jours derniers jusqu’à quatre-vingts heures d’attente pour entrer en Pologne, et plus de trente heures pour la Moldavie. Alors que 650 000 civils ont déjà quitté l’Ukraine, ils pourraient être bientôt plus de six millions.

Monsieur le Premier ministre, en plus de prendre en charge ces réfugiés qui arrivent de façon massive, pouvons-nous leur faciliter l’accès aux postes-frontières et, sans porter atteinte à la souveraineté des pays d’accueil, les aider sur un plan logistique à rétablir un flux susceptible d’éviter tout simplement une catastrophe humanitaire sur les routes ?

Les inquiétudes se portent aussi sur le ravitaillement. Bientôt, la capitale sera assiégée. Doit-on craindre un nouveau Sarajevo ?

Hommes, femmes et enfants se retrouvent piégés, parmi lesquels un peu plus de 1 000 Français. Les cellules de crise réalisent un extraordinaire travail de contact individuel, de localisation, de recensement et de soutien, mais elles n’ont pas de solution à proposer, l’évacuation aérienne étant pour l’instant, hélas !, une hypothèse à écarter.

Monsieur le Premier ministre, nous savons plus que jamais que les pires menaces prospèrent dans l’ombre.

À cet égard, je souhaite exprimer une inquiétude particulière concernant la sécurité des installations nucléaires en Ukraine, M. l’ambassadeur d’Ukraine en France m’ayant alertée sur l’incapacité du pays à garantir le fonctionnement du site de Tchernobyl, tombé entre les mains des Russes. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) appelle à la plus grande prudence sur ce sujet, mais ne peut pas exclure la possibilité qu’une augmentation de l’ambiance radiologique ait pu être constatée. Il s’agit donc d’un point de vigilance.

Danger à Kharkiv, danger à Kiev, danger sur les routes de l’exode, danger sur les sites sensibles : l’Ukraine n’est que danger et douleur. L’Ukraine n’est que courage. Face à l’ennemi, la pression massive d’une Europe unie et déterminée doit être absolue. Nous croyons en l’efficacité de cette stratégie, après avoir tant cru aux canaux diplomatiques qui, malgré tout, restent et doivent rester ouverts.

Nous mesurerons dans les jours qui viennent l’impact de la rupture des échanges avec la Russie et, dans le même temps, les limites de nos fragilités et dépendances économiques et énergétiques.

À court terme, il nous faudra nous adapter à des pénuries de matières premières, à un prix du carburant prohibitif, à des hausses de prix probablement difficilement supportables et à des pertes de marchés. La paix est à ce prix.

Le groupe Union Centriste mesure tous ces enjeux et soutient fermement la politique nationale et européenne.

Dans mes veines coule autant de sang russe que de sang ukrainien. Nous sommes nombreux dans ce cas. J’espère encore qu’un être humain ne puisse pas tuer son propre frère.

Au péril de leur vie, près de 500 chercheurs et journalistes russes ont publié une tribune dans laquelle ils expriment leur protestation et exigent la paix. « Cette guerre est injuste et absurde », disent-ils, « la guerre avec l’Ukraine est un pas vers le néant ».

Il faut que Poutine, l’homme sans vérité, l’homme sans humanité, soit désormais un homme sans peuple et sans allié. Il faut qu’il soit seul, de plus en plus seul, et que ce soit son énorme et fatale fragilité. Le fil de l’histoire du peuple russe reprendra son cours. Faisons bien la différence entre le président Poutine et la nation russe qu’il tente de museler !

Nous sommes à l’heure des décisions collectives, qui doivent être à la mesure de l’immense leçon de courage que nous donne chaque Ukrainien, et en premier lieu le président Zelensky.

« L’Ukraine se bat avec la certitude qu’elle défend le monde entier », nous a dit M. l’ambassadeur Vadym Omelchenko. Répondons-lui ici, dans ce même hémicycle, qu’il n’est pas seul, que l’Ukraine n’est pas seule, que le peuple ukrainien n’est pas seul. Slavia Ukraini, gloire à l’Ukraine !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion