Intervention de Nathalie Fourcade

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 23 février 2022 à 14h00
Audition de M. Pierre-Jean Lancry président par interim et Mme Nathalie Fourcade secrétaire générale du haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie

Nathalie Fourcade, secrétaire générale du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie :

Ces scénarios visent à répondre aux limites du système actuel. Nous sommes partis d'emblée sur quatre scénarios polaires. C'est inhabituel dans nos travaux, mais il est très vite apparu que sur un tel sujet, nous ne parviendrions pas à obtenir de consensus entre tous nos membres. Ces scénarios éclairent la diversité des choix possibles.

Le premier scénario, dit d'amélioration dans le cadre de l'architecture actuelle, vise à apporter des réponses sans changer fondamentalement le cadre actuel. Il comprend différentes mesures. Les premières visent à modifier les règles de remboursement de la sécurité sociale dans le but de limiter les restes à charges importants après assurance maladie obligatoire. D'autres mesures portent sur la soutenabilité financière de l'assurance maladie complémentaire, dans l'objectif d'en favoriser l'accès. Il peut s'agir de relever le seuil d'éligibilité de la couverture santé solidaire pour les retraités ou de mesures spécifiques aux salariés précaires, aux micro-entrepreneurs ou aux exploitants agricoles. Nous proposons également de donner à l'Union des caisses d'assurance maladie complémentaires la capacité d'engager les complémentaires santé dans le cadre de négociations conventionnelles pour améliorer la régulation conjointe du système de santé par la sécurité sociale et l'assurance maladie complémentaire.

Le scénario n° 2 (assurance complémentaire obligatoire universelle et mutualisée) pousse à son terme la généralisation de l'assurance maladie complémentaire, après l'Accord national interprofessionnel (ANI) de 2013. Il consacre le couple sécurité sociale/assurance maladie complémentaire comme le socle de la protection sociale en santé. L'assurance maladie complémentaire serait constituée comme service d'intérêt économique général. Tous les assurés auraient une obligation d'adhésion, et les organismes complémentaires auraient l'obligation d'assurer les personnes qui en font la demande. Cette obligation réciproque permettrait d'augmenter le degré de solidarité sur le marché de l'assurance maladie complémentaire. Il serait possible d'imposer des règles concernant les primes versées par les assurés et, ainsi, de limiter leur progression en fonction de l'âge.

Nous avons réalisé des simulations d'impact. Les primes des actifs augmenteraient, tandis que celles des retraités diminueraient. Nous proposons qu'au socle des garanties de base s'ajoutent des garanties définies au niveau des branches, de manière à laisser un rôle à la négociation. Ce scénario présente des avantages, mais aussi une limite : la complexité du double système de remboursement perdurerait, de même que les frais de gestion associés.

Le scénario n° 3 vise à augmenter les taux de remboursement de la sécurité sociale jusqu'au tarif de responsabilité. Le ticket modérateur serait supprimé. Le financement se ferait suivant les principes actuels de la sécurité sociale. L'un des objectifs de ce scénario consiste à augmenter le pouvoir d'achat des ménages en réduisant les frais de gestion des complémentaires santé. Les frais de gestion que supportent les professionnels seraient également réduits. Ce scénario vise aussi à faciliter les réformes des modes de rémunération des professionnels et des établissements. Nous avons fait le choix, pour définir le périmètre des soins remboursés par la sécurité sociale, d'exclure les dépassements d'honoraires. Ces derniers resteraient donc remboursés par les complémentaires santé.

Dans les hypothèses retenues, les finances publiques auraient à supporter 22,5 milliards d'euros supplémentaires, tandis que 5,4 milliards d'euros de frais de gestion seraient restitués chaque année aux ménages. Les gains seraient plus marqués pour les personnes âgées et les personnes à faible revenu. Enfin, cette réforme a été conçue de manière à être neutre pour les employeurs.

Dans le scénario n° 4 (décroisement des domaines d'intervention de la sécurité sociale et de l'assurance maladie complémentaire), l'assurance maladie complémentaire deviendrait payeur au premier euro sur les soins dont elle est le financeur majoritaire (optique, dentaire, audioprothèses), tandis que les autres soins seraient remboursés à 100 % par la sécurité sociale. L'objectif consiste à clarifier les rôles de chacun, à simplifier la régulation et à accorder des marges de liberté aux complémentaires et aux assurés. Les plus modestes auraient toujours accès à la complémentaire santé solidaire.

Nous avons simulé plusieurs options de bouclier sanitaire, lequel vise à permettre un remboursement à 100 % par la sécurité sociale au-delà d'un certain niveau de dépenses.

Enfin, notre rapport contient également des propositions transversales concernant le développement de la prévoyance.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion