Merci monsieur le président. Je salue tous nos collègues présents ainsi que nos invités et me réjouis de cette initiative conjointe de nos deux délégations qui va aborder le sujet important de l'Indopacifique, y compris sous un angle prospectif.
La prospective consiste à partir du présent pour imaginer l'avenir, avec rigueur, avec méthode, en confrontant les hypothèses, en comparant les scénarios. Nous connaissons le point de départ, que nos invités ne manqueront pas de nous rappeler. La France en Indopacifique compte 1,6 million de citoyens, 7 000 militaires, et 9 des 11 millions de kilomètres carrés de notre ZEE, la deuxième mondiale. Forts de ce constat, quels scénarios pouvons-nous imaginer pour la France, pour la place des outre-mer, dans l'Indopacifique à horizon 20 ou 30 ans ?
Je ne doute pas que nos invités sauront se montrer optimistes. Mais la prospective, c'est aussi savoir mettre en perspective et c'est là que les choses se compliquent.
À titre d'exemple, la présence française dans cette région qui, dans sa définition la plus restreinte, regroupe la moitié de l'humanité, s'établit à 1,6 million de personnes. C'est l'équivalent de la population de la petite ville chinoise de Chaozhou, ou un dixième de sa voisine Shenzhen, l'un des plus grands ports au monde alors qu'elle n'existait pas il y a trente ans.
Ensuite, 7 000 militaires, c'est à peu près la taille de l'armée du Brunei, petit sultanat situé sur l'île de Bornéo. Pour comparaison, les États-Unis disposent de 375 000 hommes dans la région, mais aussi de 5 porte-avions, 200 navires, 1 000 avions et de nombreux sous-marins auxquels s'ajouteront bientôt ceux de l'allié australien. L'armée chinoise compte 2,2 millions d'hommes. L'Inde, 1,5 million. Presque tous les pays du « top 15 » en la matière sont riverains de l'Indopacifique.
Enfin, les 9 millions de kilomètres carrés de ZEE représentent une grande richesse, mais surtout une immense responsabilité. Les eaux sont poissonneuses, mais la pêche illégale et la pollution plastique font des ravages. Les nodules polymétalliques qui tapissent certains fonds marins, suscitent bien des intérêts, mais qui aura les moyens d'investir dans leur exploitation ? Sans doute les mêmes pays qui, déjà, convoitent le nickel de Nouvelle-Calédonie, ou qui tirent déjà ces câbles sous-marins par lesquels transitent 95 % du trafic internet mondial.
Ne voyez aucun pessimisme dans ces quelques rappels, bien au contraire. Si la France veut se donner les moyens de ses ambitions dans l'Indopacifique, si elle veut relever les défis du siècle à venir, il lui faudra s'appuyer sur tous les atouts dont elle dispose. Ses départements et territoires d'outre-mer en sont les premiers.