Intervention de Hervé Maurey

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 9 mars 2022 à 9h00
Contrôle budgétaire – situation financière et perspectives de la sncf– communication

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

rapporteur spécial. – Notre mission de contrôle nous a aussi convaincus que la SNCF a encore beaucoup de chemin à parcourir pour gagner en compétitivité. C’est à une véritable révolution culturelle qu’elle doit s’atteler.

Les pesanteurs du passé, notamment en termes d’organisation du travail, continuent d’être pour elle un handicap. Le législateur a fait sa part du travail en votant l’extinction du statut de cheminot, une mesure nécessaire, qui améliorera sa compétitivité, mais qui ne produira ses effets que progressivement. Désormais, la SNCF a toutes les cartes en main pour engager des réformes ambitieuses en matière de ressources humaines. Nos travaux nous ont permis de constater qu’elle disposait de marges de manœuvre dans ce domaine. Pour résorber ses sureffectifs, elle devra amplifier le rythme de ses réductions de postes pour le porter à environ 2 % par an.

Le programme d’optimisation des fonctions transverses devrait être approfondi, pour que la SNCF se rapproche des standards européens. La polyvalence des agents et l’externalisation devraient être davantage développées. Je rappelle que le Cour des comptes a évalué à 350 millions d’euros les gains escomptés d’une amélioration de la polyvalence à la SNCF.

Comme le lui permet la loi depuis 2018, la SNCF devrait décentraliser les négociations sociales, notamment sur l’organisation du temps de travail. Dans le but de préserver le climat social en son sein, ce n’est pas la voie qu’a suivie la SNCF lorsqu’elle a conclu un accord de groupe en octobre 2020. Ainsi, les règles rigides de l’accord collectif sur l’organisation du temps de travail de 2016 continuent de s’appliquer à l’ensemble du personnel de la SNCF. Elles handicapent sérieusement SNCF Voyageurs, d’autant plus que le déficit de compétitivité lié à cet accord est exacerbé sur le TER. Ce n’est pas un hasard si l’opérateur répond aux appels d’offres des régions par des filiales dédiées échappant à ce cadre rigide qui ne lui permettrait pas de rivaliser avec ses concurrents.

L’ouverture à la concurrence est une chance pour le secteur ferroviaire. Elle fera office d’aiguillon pour améliorer la compétitivité de la SNCF. Elle enclenchera un cercle financier vertueux favorable à la viabilité économique du secteur.

Cependant, pour que l’ouverture à la concurrence offre tous ses bénéfices au système, il ne suffit pas de la proclamer. Il faut la concrétiser en levant les freins qui l’entravent.

Les interrogations quant à l’indépendance réelle du gestionnaire d’infrastructure en font partie. L’organisation issue de la réforme de 2018, qui fait cohabiter SNCF Voyageurs et SNCF Réseau au sein d’un même groupe intégré et conduit des dirigeants de la société mère à siéger au conseil d’administration de SNCF Réseau, n’est pas de nature à donner toutes les assurances d’impartialité du gestionnaire d’infrastructure. Or celles-ci sont absolument indispensables pour instaurer le climat de confiance nécessaire au développement de la concurrence.

Par ailleurs, le fait que les résultats de SNCF Voyageurs déterminent le niveau des recettes de SNCF Réseau peut amener les opérateurs à s’interroger.

Aussi, pour permettre une réelle ouverture à la concurrence, nous recommandons de rendre SNCF Réseau parfaitement indépendant en le sortant du giron du groupe SNCF, sur le modèle de ce qui a été fait dans le secteur de l’énergie.

Après de nombreuses tentatives infructueuses et afin de remettre enfin sur rails les modèles économiques de la SNCF et du système ferroviaire, nous vous soumettons une série de recommandations qui demandent des efforts conséquents tant à l’État qu’à la SNCF. Nous sommes convaincus que ce n’est qu’à ce prix qu’il est réaliste d’envisager une massification économiquement viable du mode ferroviaire.

Nos recommandations, au nombre de dix-neuf, sont structurées autour de trois axes : premièrement, la SNCF doit faire sa part du chemin et agir résolument pour améliorer sa gouvernance et sa performance ; deuxièmement, l’État a affiché des objectifs en matière de relance du fret ferroviaire et de la desserte des territoires, il doit désormais les concrétiser ; troisièmement, nous pensons que les équilibres financiers entre l’État, la SNCF et les régions doivent être remis à plat et que l’engagement financier de l’État en faveur du réseau doit être renforcé.

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