Je ne définirais pas une organisation idéale car cela dépend du comportement des groupes. On peut être un grand groupe et avoir un comportement respectueux des équilibres à l'égard des auteurs et des libraires. Nous sommes dans une économie régulée par le prix unique du livre, ce qui entretient des liens très particuliers entre les auteurs, les éditeurs et les libraires.
Nous avons dit qu'une concentration accrue serait tout à fait dangereuse mais c'est surtout une question de garde-fous. Le prix unique du livre confère aux éditeurs une responsabilité centrale dans l'organisation du marché. L'éditeur fixe à la fois la rémunération de l'auteur et la marge du libraire, sachant que les diffuseurs et distributeurs lui appartiennent. C'est donc une responsabilité considérable. Il faut que l'éditeur ait un niveau d'engagement à la hauteur de cette responsabilité. Certains groupes se montrent plus vertueux que d'autres à cet égard. Si nous dénonçons la concentration, c'est aussi parce que les deux groupes concernés - et particulièrement Hachette, le leader - sont loin d'être exemplaires en la matière. Les petits libraires tirent le diable par la queue depuis de très nombreuses années, vis-à-vis d'Hachette, pour bénéficier de conditions commerciales minimum car Hachette ne veut simplement pas les rémunérer.
L'équilibre de la concurrence dépend à la fois de la taille des acteurs et de leurs comportements, les deux étant liés puisque un acteur dominant peut abuser de sa position. L'idéal est donc à la fois de limiter la taille des acteurs mais également de favoriser de leur part des comportements vertueux.