Il y a beaucoup de débats sur le fonctionnement des intercommunalités, sur la place des maires et la reconnaissance de leur rôle dans l'intercommunalité, notamment s'agissant d'Aix-Marseille. Je ne suis pas favorable à ces histoires de fédérations d'intercommunalité. Nous avons une chance en France, ce sont nos maires et nos équipes municipales, présents sur tout le territoire, et ce lien de la République entre maire et département est véritablement fondateur. Allons-nous revenir à des situations antérieures ? On rêvait d'une France avec des grandes régions et des intercommunalités fortes, mais je ne suis pas favorable à ce schéma qui va éloigner les centres de décision et qui va désespérer aussi un certain nombre de maires.
Il faut qu'on renforce la coopération avec les intercommunalités parce que c'est un lieu d'action, mais celles qui n'ont pas de ressources propres vont se trouver confrontées à des problèmes financiers de même nature que ceux des départements. On leur promet des compétences qu'elles n'ont pas les moyens d'assumer et cela les effraie. A côté, les grandes intercommunalités des communautés d'agglomérations puissantes ont évidemment une autre vision.
S'agissant des contrats de coopération, nous travaillons avec Carole Delga à l'élaboration d'un cadre de coopération régionale-départementale. « Il faut rendre cela possible », me dit-elle. C'est une première étape, certes, mais je crains qu'en pratique, on ne se dirige vers des difficultés. Il faut vraiment que l'on ait des chefs de file et sur ce sujet, j'aimerais travailler avec vous, pour définir des socles de compétence.
Concernant les conseillers territoriaux, je vois bien ce qui est en train de se produire : on va nous faire une grande réforme en revenant au conseiller territorial, sur les régions, etc, et je n'y suis absolument pas favorable. La question centrale est celle de la proximité entre l'élu et le peuple. Dans le climat actuel, il faut se garder de tout bouleversement, et s'appuyer sur le socle de la République des territoires des maires, avec le département. A qui s'adresse un maire sinon à son sénateur et son conseiller départemental ? On ne sait même pas qui est conseil régional ! Le sujet central n'est pas une grande réforme territoriale, c'est celle du chef de file.
Concernant l'action sociale, une prestation est un droit qui doit être assurée partout sur le territoire départemental. L'État doit cesser de nous renvoyer à nos propres responsabilités sur des prestations qui relèvent de la solidarité nationale. Nous sommes le seul niveau de collectivité à avoir accepté une péréquation horizontale, c'est-à-dire que les départements qui avaient le plus de ressources participent à aider ceux qui en avaient le moins, nous l'avons fait de manière volontariste, mais cette situation a ses limites, et maintenant il faut que l'État assume sa responsabilité sur des prestations qui sont celles de solidarité nationale, qui s'agisse de l'APA ou du RSA.
Deuxième sujet, il ne faut pas confondre la prestation avec les conditions afférentes au droit. Quand vous êtes en Seine-Saint-Denis, les problèmes ne sont pas les mêmes qu'à Guéret, 45 000 habitants, dans la Creuse. Il faut une adaptation des politiques, et c'est pourquoi que je suis en désaccord profond avec ce que dit le président de la République sur la différenciation. Bien sûr qu'il y a de la différenciation : quand vous êtes au RSA dans le village de Marigny-le-Cahouët, ce n'est pas la même chose que lorsque vous êtes au RSA en Seine-Saint-Denis. Il faut une différentiation avec une harmonisation. C'est-à-dire que le droit doit être garanti, en même temps que les devoirs doivent être assurés, tout en prenant en compte la dimension territoriale, voilà ce qu'il faut qu'on arrive à faire, mais cela n'est pas encore ancré dans la tête de certains. Oui à l'égalité des citoyens, mais une réponse différenciée, adaptée à chaque personne, et c'est pour cela notamment que la recentralisation d'un certain nombre de politiques n'est pas la bonne réponse, car à notre échelon de proximité, nous connaissons les publics et sommes en mesure d'accompagner chaque personne. Le vrai danger est la tentation d'une grande réforme institutionnelle avec le retour d'un conseiller territorial. Et le deuxième danger est que l'État continue de considérer que les départements sont des services extérieurs de l'Etat déconcentré. Pour mieux agir pour les Français, il faut agir en proximité. Les départements sont disponibles auprès du Sénat pour travailler sur ce thème.