Intervention de Robin D'Angelo

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 17 février 2022 : 1ère réunion
Audition de M. Robin d'aNgelo et Mme Marie Maurisse journalistes ayant enquêté sur le milieu de la pornographie

Robin D'Angelo :

Un arsenal de lois existe. Il fonctionne ; les mises en examen actuelles dans le monde de la pornographie le montrent. On a pu découvrir qu'une rémunération était prévue pour les personnes chargées de recruter des femmes, que des pratiques pouvaient être imposées à ces dernières par la surprise. Des lois sont en place et permettent de sanctionner les mauvais comportements. Simplement, jusqu'à présent, on avait l'impression que ce milieu était « sous-enquêté » par la police. Jusqu'à ce qu'il fasse l'objet d'un battage médiatique, un site comme French Bukkake, aujourd'hui au coeur d'une enquête tentaculaire, a pu exister pendant dix ans dans une indifférence totale. En réalité, il y avait déjà tout pour sanctionner ce type de pratiques. Plutôt que de partir dans de grands débats théoriques sur un éventuel statut de victimes, il suffit de regarder ce qui est légal et ce qui ne l'est pas. On s'aperçoit que cela fonctionne très bien.

Concernant les associations, je me reconnais totalement dans certains de leurs discours. J'ai été saisi par la normalisation du travail du sexe dans ce milieu. Elle conduit forcément à des abus. Vendre son sexe n'est pas un travail comme un autre. J'ai par exemple été confronté à un producteur qui avait vendu à son diffuseur une scène de sodomie. L'actrice avait à l'origine donné son accord mais arrivée au moment de tourner la scène, elle ne voulait plus réaliser cette pratique. Le problème, c'est qu'elle s'était engagée au préalable à la réaliser quoi qu'il arrive. Le producteur s'estimait dans son bon droit, il avait vendu cette pratique à son diffuseur. L'actrice ayant donné son accord préalable, il a insisté jusqu'à ce qu'elle cède. C'est évidemment un abus sexuel. Si on se place d'un point de vue professionnel et qu'on considère la pornographie comme un métier comme un autre, on peut toutefois estimer que l'actrice n'était pas dans son droit. C'est le point de vue du producteur, qui a terminé la scène en disant « Dis donc, tu crois qu'une patineuse artistique ne se foule jamais la cheville ? » avant de lui dire « Toi, tu es vraiment la CGT du trou de balle ». À partir du moment où on considère l'échange, la transaction sexe contre argent comme un métier comme un autre, on va se retrouver confrontés à ces situations d'abus. C'est la limite du consentement. Effectivement, l'actrice était au départ consentante pour réaliser cette pratique. Mais c'est du sexe, pas un commerce comme un autre. Au lieu du consentement, la question qui doit primer est celle du désir, puisque nous parlons ici de relations sexuelles. Un consentement ne se basant que sur une transaction expose forcément à des abus. Sur ce tournage, l'ambiance était pourtant très bonne, c'était très sympathique. Personne n'était agressif. Nous avons tous bu un coup ensemble à la fin. Il s'est toutefois passé cette scène, qui est évidemment un abus sexuel.

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