Je souhaite que l'on revienne sur l'article 7 de la loi du 19 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite « Égalim 2 », relatif aux pénalités logistiques infligées par les distributeurs, car des dérives ont été observées. À défaut de pouvoir aborder la question en séance publique, il nous a semblé intéressant d'en discuter en commission afin qu'un compte rendu officiel soit établi.
Cette loi est majoritairement entrée en vigueur lors des négociations commerciales qui se sont achevées au début du mois de mars dernier.
Les négociations commerciales entre industriels et distributeurs sur les produits de marques ont été difficiles jusqu'au bout et les premiers éléments dont nous disposons font état d'un bilan mitigé : certes, les résultats officiels devraient montrer un retour de l'inflation sur le prix 3x net. Certes, cette inflation est relativement hétérogène entre filières, mais elle est largement insuffisante pour compenser la hausse considérable des coûts des industriels à la suite de l'envolée des cours des matières premières agricoles, des coûts de l'énergie, du transport et des emballages.
Pour ces raisons, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a demandé la réouverture des négociations commerciales afin que les industriels renégocient leurs tarifs et puissent passer un accord commercial prenant davantage en compte le contexte actuel du marché. Rappelons toutefois que cette volonté politique dépend du contenu juridique des clauses de renégociation figurant dans les contrats et que ces clauses fixent non pas une obligation de résultat, mais une simple obligation de moyens. Puisse l'optimisme politique du ministre en cette période électorale transformer ce voeu pieux en évolution concrète !
Cette annonce fera bien entendu l'objet d'une attention particulière de notre groupe de suivi de la loi Égalim, qui devrait débuter prochainement ses travaux d'analyse.
Toutefois, nous avons été alertés par de très nombreux industriels sur la question des pénalités logistiques. Dans les contrats, les interprétations de la loi retenues par les distributeurs ont pu être volontairement provocatrices, ce qui a abouti à un travestissement, voire à une méconnaissance claire de l'intention du législateur.
Ainsi, certains distributeurs ne parlent plus de pénalités logistiques mais « d'indemnités » ou de « pénalités » tout simplement, espérant ainsi échapper au cadre législatif en vigueur. D'autres distributeurs interprètent la loi d'une telle manière qu'ils n'ont pas à justifier avoir subi un préjudice de manière suffisamment précise : cela prive donc le fournisseur de son droit de contestation. Enfin, certaines déductions d'office persistent. Ainsi, dans de nombreux cas, tout se passe comme si rien n'avait changé !
Nous savions que les contournements de la loi seraient mécaniques. Vous ne l'ignorez pas, nous avons de sérieuses réserves quant à la bonne application de la loi Égalim 1 et de la loi Égalim 2. Mais si nous ne réglons pas le problème des pénalités logistiques rapidement, nous mettrons nos industriels dans une position intenable compte tenu de la situation actuelle liée à la guerre en Ukraine et des difficultés massives de logistique auxquelles ils seront confrontés, tant en raison du manque de chauffeurs que du coût du transport.
J'ai donc demandé à notre rapporteure de la loi, Anne-Catherine Loisier, de préciser, par un rapport verbal, l'intention du législateur sur le point précis des pénalités logistiques pour en faciliter une application stricte et homogène par tous les acteurs.
J'avertirai, au terme de la réunion de la commission, les ministres de l'agriculture et de l'économie, ainsi que la directrice générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de ce rapport précisant officiellement l'intention du législateur sur cette question essentielle.