Intervention de Patricia Demas

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 29 mars 2022 à 15h30

Photo de Patricia DemasPatricia Demas :

rapporteure. – Nous sommes tous d’accord pour faire de la lutte contre l’illectronisme une cause nationale. Cette mission d’information devait rester dans un cadre d’investigation et de propositions, il était donc difficile d’aborder tous les sujets liés à l’exclusion numérique. Il faut faire de ce combat l’une des premières causes nationales, notamment dans l’enseignement.

Quant à faire du département le chef de file en la matière, l’idée m’a certes « titillée », ce serait sans doute le plus facile. Or, au fil des auditions, il s’avère que le département est certes le chef de file naturel dans les zones rurales, mais beaucoup moins dans les zones urbaines, où les EPCI et les centres communaux d’action sociale (CCAS) jouent un rôle bien plus important. Il convient de se fonder sur les caractéristiques de chaque territoire pour ne pas casser les dynamiques locales. Il faut aussi prendre en considération tous les acteurs, publics, privés et associatifs. C’est ce que je propose de faire dans les commissions territoriales de l’inclusion numérique, pour ne pas oublier les volets économiques et culturels de cette action.

Quant à l’« aller vers », nous sommes d’accord. Pour apporter des réponses aux Français, La Poste est un maillon indispensable. J’évoque aussi dans mon rapport les aides à domicile, auxquelles on pourrait délivrer une certification « Aidants Connect ». Il faut aussi offrir une formation aux agents des collectivités territoriales, notamment aux secrétaires de mairie.

Concernant l’accessibilité, des alternatives peuvent être offertes pour une connexion internet dans les endroits les plus difficiles ; c’est tout l’intérêt du guichet « cohésion numérique des territoires ». Ce guichet reste trop peu connu. Je recommande aussi une boîte à outils lisible sur les sites des préfectures.

Quant aux déclarations d’impôts, la certification « Aidants Connect » vise justement à résoudre ces problèmes. Je propose de développer cette certification auprès d’acteurs de proximité.

M. Bruno Belin. – Il est essentiel de déterminer qui fait quoi. Avec Gilbert Favreau, nous avions créé un syndicat commun, « Poitou numérique », pour développer la fibre sur nos territoires. Il avait fallu mettre près de 300 millions d’euros sur la table, à destination avant tout des opérateurs. Ceux qui gagnent autant d’argent au bout ne peuvent-ils pas s’impliquer davantage ? Orange fait de très bonnes affaires. Contractuellement, ne peut-on pas imposer aux opérateurs d’aller faire le boulot qui va leur fournir des abonnements ? Certains opérateurs publics ou parapublics comme La Poste offrent bien un accompagnement.

Nous avons aussi remarqué que c’était parfois plus simple pour les EPCI que pour les départements d’agir en la matière : il faut y aller au cas par cas.

Quant au suivi dans les maisons France Services, l’État avait pris beaucoup d’engagements. Où en est-on ? Ce sont toujours les communes qui paient ! Pour l’accompagnement des usagers, rappelons que les secrétaires de mairie ne travaillent que rarement à temps plein dans les zones rurales et sont déjà surchargés de travail. Les opérateurs et l’État doivent prendre leur part de l’effort.

rapporteure. – La recherche de sources de financement pérennes est bien sûr cruciale : tous les acteurs, publics ou privés, doivent être mis autour de la table pour financer l’inclusion numérique sur le long terme.

Concernant les maisons France Services, je recommande de refonder la stratégie nationale, qui remonte à 2018 et n’a fait l’objet d’aucun feedback.

Quant à l’« aller vers », je préconise la mise en place d’un numéro vert, car la dématérialisation des services n’est pas une fin en soi : il faut maintenir l’accessibilité des droits à tout Français, où qu’il habite.

Mme Angèle Préville. – Si l’on ne choisit pas un chef de file, quelle assurance avons-nous que tous les territoires seront accompagnés et qu’il n’y aura pas de trous dans la raquette ?

rapporteure. – Je propose un chef de file à la carte, car il me semble inopportun d’imposer le même à tous les territoires. Les auditions ont montré qu’il existe des chefs de file naturels qui varient en fonction des zones : plutôt les départements en zone rurale, plutôt les EPCI en zone urbaine. Il faut travailler de manière transversale et de manière souple, en encourageant les dynamiques locales.

Mme Angèle Préville. – Mais est-on sûr qu’aucun territoire ne sera oublié ?

rapporteure. – C’est avant tout une question de volonté politique. Il y a des territoires où les élus en ont plus que dans d’autres.

M. Didier Mandelli. – Certains élus, même si on les désignait chefs de file, n’assumeraient pas ce rôle dans les faits. Tous les acteurs de l’inclusion numérique ne sont d’ailleurs pas des collectivités : il y a beaucoup d’associations, des CCAS… Il serait compliqué aujourd’hui de désigner une seule institution. Ce qui importe est d’être le plus efficient possible, au plus proche des besoins des exclus du numérique, en accompagnant tous les acteurs.

Mme Marta de Cidrac. – Je félicite à mon tour notre rapporteure pour ce travail fort intéressant. L’illectronisme est parfois dû à une mauvaise connexion, voire à l’impossibilité de se connecter. Pour résorber ce problème, l’adressage physique joue un rôle important. La Poste dispose d’un quasi-monopole en la matière, ce qui lui permet d’offrir de nombreux services. Le partage de ces données avec les collectivités compétentes est-il envisagé ? Dans quelle mesure la puissance publique peut-elle aujourd’hui accéder à l’ensemble de nos concitoyens ?

Mme Évelyne Perrot. – Dans mon département, les maisons France Services fonctionnent bien quand les EPCI sont volontaires et que les maires assurent correctement le relais.

Mme Laurence Muller-Bronn. – Merci à notre rapporteure pour ce rapport très clair et intéressant. M. Belin a suggéré que les opérateurs participent au financement de la mise en réseau des territoires. En Alsace, la région et les départements ont lancé une grande opération et se sont adressés à Orange pour couvrir notre canton : cet opérateur finance les installations dans les zones rurales, rien ne reste à la charge de notre communauté de communes. De tels accords existent !

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