Intervention de Ludivine Demol

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 30 mars 2022 : 1ère réunion
Table ronde sur l'accès des mineurs aux contenus pornographiques et ses conséquences

Ludivine Demol, chercheuse-doctorante en sciences de l'information et de la communication à Paris 8 :

Au cours de ces échanges, deux à trois axes majeurs sont apparus.

Le premier concerne la protection de l'enfance : il s'agit d'éviter le traumatisme d'enfants devant des contenus pornographiques. Pour autant, nous ne connaissons pas la prévalence de ces traumatismes au regard de la diversité des consommations pornographiques chez les jeunes.

Le deuxième est lié à la représentation des sexualités, majoritairement sexistes. Je le rappelle, les violences sexistes et sexuelles existaient bien avant les années 2000 et l'avènement d'Internet. On en entend davantage parler aujourd'hui, grâce à des avancées féministes comme #MeToo, ainsi qu'au travail des activistes et associations féministes. Les rapports socio-sexistes sont présents dans l'ensemble de la société, j'insiste sur ce point. Ainsi, dans Stars Wars, au moment où le héros veut embrasser la princesse, elle refuse. Finalement, il l'embrasse et elle accepte ce baiser. C'est une image d'agression sexuelle, qui fait la promesse d'une sexualité facilement accessible pour les hommes à partir du moment où ils insistent un peu. J'évoquerai également les contes de fées, où la princesse échange son coeur et son corps en échange du courage et de la force du chevalier.

On le voit bien, la question concerne plus généralement la construction des identités de genre et la manière dont les jeunes femmes et les jeunes hommes sont amenés à la sexualité.

Enfin, quelles pistes pourraient-elles être retenues pour aider les jeunes à mieux appréhender les images pornographiques ? À mes yeux, il faut construire un travail sur toutes les images, qu'elles apparaissent sur Internet ou à la télévision, et sur la musique. Le comportement sexiste ne doit pas être réduit à la simple pornographie.

Nous avons aussi besoin d'espaces de parole non jugeants. Les jeunes se déclarant addicts à la pornographie dénoncent une absence d'espaces de discussion, de réflexion et de confrontation. J'ai appris auprès de ces jeunes que la pornographie ne les menait pas vers des situations de violence ou de souffrance, car ils étaient déjà dans des situations de vulnérabilité et de conflit. La consommation massive de pornographie venait répondre à une demande d'évasion et de recherche de plaisir immédiat.

Pour ce qui concerne l'école, je vous rappelle que la loi Aubry préconise trois séances d'éducation à la sexualité, du primaire au lycée. Tel n'est pas le cas aujourd'hui. Les élèves doivent s'estimer heureux s'ils reçoivent une ou deux séances au cours de leur scolarité. Il faut donc des moyens financiers, ainsi que du personnel formé, simplement pour appliquer la loi.

Je rejoins M. Borst s'agissant de l'apprentissage des compétences socio-émotionnelles, qui concernent surtout les rapports sociaux entre les femmes et les hommes. Cela nécessite la transmission d'outils d'apprentissage des situations de domination.

Il convient également de financer des études. Pour ma part, je fais une thèse sur ces sujets et je touche le revenu de solidarité active (RSA). Nous sommes plusieurs à travailler sur les violences sexistes et sexuelles, ainsi que sur les questions d'identité et de genre et à ne pas être financés.

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