Intervention de René Troccaz

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 23 février 2022 à 9h30
Audition de M. René Troccaz consul général de france à jérusalem

René Troccaz, Consul général de France à Jérusalem :

Je confirme que la société civile est massivement éloignée de l'Autorité palestinienne. Je n'entends dans les territoires palestiniens que des propos critiques vis-à-vis de celle-ci. S'agissant de l'éventualité d'un État unique, jusqu'à présent, la solution à deux États pouvait constituer un problème tant pour Israël, qui a des réserves, que pour les Palestiniens, qui doit fournir un effort pour y parvenir. Dès lors que cette perspective disparaît, le problème devient celui d'Israël, à qui il appartiendra de définir ce que sera cet État, d'autant plus que depuis 1948, les Palestiniens installés dans l'espace géographique de l'ancienne Palestine sous mandat britannique ne partent pas. Cette question ouverte serait donc un problème israélien à l'avenir. Par ailleurs, les Américains ne parviennent pas à croire à la solution à un seul État, car sa nature risquerait d'être contestée par la démographie.

S'agissant des chrétiens d'Orient, le projet de reconfiguration du Mont des Oliviers en parc archéologique est un sujet extrêmement sensible. C'est à mon sens pour cette raison que les autorités israéliennes ont reporté la décision, sous la pression discrète mais ferme des Américains.

Vous m'avez interrogé sur la situation de notre compatriote franco-palestinien, Salah Hamouri. J'ai demandé la semaine dernière à mes services de se mettre en rapport avec lui, pour voir si nous pouvions le faire bénéficier de droits à la sécurité sociale française.

L'enseignement du français a une place modeste dans les territoires palestiniens, dont il reste la seconde langue, loin derrière l'anglais. Avec le ministère palestinien de l'Éducation, nous travaillons à la mise en place d'un mécanisme permettant de présenter le français au baccalauréat. Dans ce cadre, l'Institut français prendrait en charge un certain nombre d'épreuves. Ce point s'inscrit dans les recommandations du rapport de Charles Personnaz sur les chrétiens d'Orient.

À ce sujet, il est à noter que seul 1 % des Palestiniens sont chrétiens, contre 10 % en 1948. En revanche, 20 % des élèves scolarisés dans les territoires palestiniens en Cisjordanie le sont dans des établissements chrétiens du patriarcat latin. Il s'agit donc d'une minorité très active, mais démographiquement réduite.

Madame Raimond-Pavero, je suis embarrassé pour vous répondre sur le nucléaire iranien, car mes collègues de Tel-Aviv ou de Téhéran seraient plus compétents en la matière. Il s'agit d'un sujet d'importance pour Israël, certainement plus prégnant que la question des territoires palestiniens. Cette menace pour Israël ne doit pas pour autant conduire à négliger la réalité du conflit israélo palestinien.

Monsieur Gontard, vous avez reposé clairement la question de la définition d'un seul État, à laquelle nous ne pouvons répondre que par des points d'interrogation perplexes et préoccupés. À mon sens, ce cheminement se fait dans les cercles politiques et sécuritaires d'Israël, qui mettent en garde contre le risque d'une remise en cause de toute la construction d'Israël depuis 1948. Les pays arabes voisins sont inquiets ; le plus inquiet d'entre eux est la Jordanie, dont 70 % de la population est d'origine palestinienne et dont le roi a un rôle de protecteur des lieux saints musulmans à Jérusalem. Le Waqf, autorité cultuelle jordanienne, administre notamment l'esplanade des Mosquées, la sécurité extérieure en étant assurée par les Israéliens. Les Égyptiens sont à la manoeuvre dans la bande de Gaza ainsi que dans le dialogue entre les factions palestiniennes. Les Russes leur ont probablement confié le relais des discussions entre le Hamas et le Fatah. De fait, rien ne se fait dans la bande de Gaza sans l'aval de l'Égypte.

Il y a quatre jours, j'ai accompagné à Jérusalem une délégation sur la coopération décentralisée composée d'une cinquantaine d'élus, représentants de municipalités, experts, ainsi que de représentants du Réseau de coopération décentralisée avec la Palestine (RCDP). Ce dernier a mis en place un programme particulièrement riche à Jérusalem Est et dans les territoires palestiniens. Il s'agit d'une dimension importante de l'activité du consulat général de Jérusalem.

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