Lorsque j'ai lu pour la première fois les Accords de Minsk, j'ai tout de suite pensé que leur application sera très difficile. Ces Accords posent au fond un vrai problème pour les Ukrainiens dont ils menacent l'intégrité territoriale et la souveraineté. Aucun président ukrainien ne pourra les appliquer selon le séquençage décrit qui fait l'objet de désaccords entre les parties. Pour les Russes, il faut d'abord organiser des élections puis rendre le contrôle de la frontière russo-ukrainienne. Pour les Ukrainiens, il faut procéder dans l'ordre inverse : la sécurité avant les élections.
Si les Ukrainiens ne contrôlent pas la frontière, comment organiser des élections ? Les partis ukrainiens peuvent-ils être présents ? Il y a aujourd'hui 1,2 million de personnes qui ont quitté le Donbass et sont éparpillés sur le territoire ukrainien. Comment organise-t-on leur vote ? C'est une question compliquée.
Il y avait une bonne dynamique en décembre 2019 puisqu'il y a eu quelques avancées en matière sécuritaire et humanitaire avec des échanges de prisonniers et un aménagement de points de passage sur la ligne de contact. Mais cet acquis n'a pas duré. Les passages aux points de contact sont désormais limités. Certains Ukrainiens qui souhaitent aller voir leur famille dans le Donbass doivent traverser le territoire russe de manière quasi-illégale.
Les échanges ont repris la semaine dernière dans le cadre du format Normandie. Dans deux semaines, il y aura une autre rencontre à Berlin. Si on peut avancer ne serait-ce que sur le plan humanitaire et sécuritaire ce serait déjà une bonne chose !
Le cessez- le feu n'a pas tenu. Les violations sont quotidiennes. Le Crisis Media Center ukrainien envoie chaque jour le bilan des morts et des blessés.
Dans les Accords de Minsk, il y a deux parties : la partie sécuritaire, humanitaire et la partie politique. Je reste très pessimiste sur les aspects politiques. Si en sept ans, on n'a pas réussi à arriver à un consensus, je ne vois pas de quelle manière on pourrait le faire aujourd'hui. Or le conflit peut repartir si les Accords de Minsk sont désavoués. Ils ont joué un rôle important. Il faut continuer à rechercher de la souplesse dans ce cadre, trouver le bon séquençage. Mais je reste très pessimiste à ce sujet.