– À la suite de la réouverture des lieux culturels, on note une inflexion de la consommation. Cela a d’abord profité au cinéma, qui a représenté 17 % des dépenses en 2021 alors même que les salles n’ont rouvert qu’à l’été. Aujourd’hui, tous les grands réseaux sont inscrits sur l’application, ainsi que la moitié des cinémas d’art et essai : la dynamique est positive.
Quant au spectacle vivant, il n’a représenté que 1,5 % des dépenses l’année dernière, dans une situation sanitaire compliquée ; au premier trimestre 2022, sa part est déjà montée à 4 %. La dynamique est portée par les festivals et les musiques actuelles. Il y a encore une marge de progression : sur près de 8 000 à 10 000 festivals en France, seuls 200 sont accessibles par le pass, un grand effort est requis. Il y a des festivals sur tous les territoires, collaborer avec eux renforcerait le maillage de l’offre. Quoi qu’il en soit, cette année devrait voir une baisse relative de la part du livre dans les dépenses, au profit des musiques actuelles et des festivals.
Pour la valorisation de nos offres, deux types d’actions sont possibles. D’abord, il faut combler certains trous dans la raquette : musées, monuments, bibliothèques, festivals... Il faut convaincre ces acteurs de l’importance de participer au pass. Nous travaillons pour ce faire avec les réseaux professionnels, mais aussi avec les collectivités territoriales, dont relèvent la plupart des musées et des bibliothèques. J’ai rencontré à peu près toutes les associations d’élus locaux. Déjà 1 500 collectivités participent activement au pass. Pour amplifier cet effort, il faut simplifier la vie des collectivités. Le pass leur permet de mettre en valeur l’offre culturelle sur leur territoire ; on peut construire des événements en commun. Nous travaillons tous pour les jeunes, il s’agit de coordonner au mieux tous les dispositifs. Des inquiétudes ont été exprimées par certaines collectivités en matière d’EAC ; nous ne voulons pas les remplacer, mais faire un maximum de synergies. On a identifié environ 80 dispositifs locaux semblables au pass Culture ; à chaque fois, on se réjouit que les jeunes de ce territoire bénéficient de deux pass et on cherche à proposer des offres communes.
Ensuite, nous valorisons nos offres par le biais d’événements exclusifs et de playlists spécifiques, autour d’événements comme le 400e anniversaire de Molière ou la panthéonisation de Joséphine Baker. Plus largement, nous améliorons l’application et nous y intégrons des recommandations par des jeunes et, bientôt, par les acteurs culturels. Nous réfléchissons à des algorithmes qui permettent aux jeunes de découvrir progressivement la diversité culturelle à partir des univers qui leur sont familiers : leur proposer d’emblée des choses qui leur sont complètement étrangères ne fonctionnerait pas, il faut d’abord accrocher leur attention.
Cet enjeu de diversification est au cœur de notre collaboration avec l’ENS. Nous construisons un modèle de scoring, pour mesurer l’effet de différentes méthodes de diversification – disciplinaire, géographique, ou thématique. Comme nous attribuons des points en fonction du degré de diversification des offres choisies par le jeune, ce modèle n’est pas exempt d’une certaine subjectivité. C’est pourquoi nous avons aussi conçu un deuxième outil, le graphe des coréservations, qui nous offre une photographie plus objective de la façon dont les jeunes réservent, pour mieux déterminer quels types de réservation sont proches ou, au contraire, éloignés. Ces outils devront progressivement nous permettre de mener des actions spécifiques pour les diverses catégories de jeunes : ceux-ci ont des pratiques culturelles différentes - plus ou moins régulières. Il faut identifier les profils et les pratiques de diverses catégories pour mener des actions ciblées qui permettront aux jeunes de chacune de ces catégories d’évoluer dans leur parcours. On mesure déjà que les filles ont une utilisation du pass plus diversifiée que les garçons, ou encore que les dépenses étalées dans le temps sont plus diversifiées.