Le Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique s'est clôturé le 1er février après huit mois de travaux. Les axes de travail étaient la gestion des calamités agricoles, l'adaptation de l'agriculture au changement climatique et la ressource en eau.
L'axe « adaptation de l'agriculture au changement climatique » est fortement lié aux deux autres. Il est impossible d'élaborer une assurance climatique équilibrée sans envisager une adaptation de l'agriculture pour la rendre plus résiliente au changement climatique et capable de continuer à produire dans le respect des ressources en eau à mobiliser.
L'approche générale consiste à renforcer la résilience globale de l'agriculture en agissant notamment sur les sols, les variétés, les pratiques culturales, les infrastructures agroécologiques et l'efficience de l'eau d'irrigation.
L'utilisation de l'eau en agriculture ne se résume pas à l'irrigation. En effet, 95 % de l'agriculture repose sur l'utilisation de l'eau naturelle, sans irrigation. Il convient également de s'intéresser aux effets des températures, des sécheresses et des inondations, du gel, etc. Nous avons travaillé en conservant à l'esprit les enjeux de souveraineté alimentaire, en nous appuyant sur la science pour objectiver les débats et en abordant les questions d'innovation dans une attitude d'écoute des parties prenantes.
Les instituts de recherche académique, de développement et les chambres d'agriculture ont contribué, ainsi que 35 interprofessions agricoles et une soixantaine de parties prenantes. Des conférences ont été organisées sur la sélection génétique, l'efficience de l'irrigation et l'agriculture résiliente, avec les meilleurs experts de ces sujets.
Concernant les filières, nous avons demandé aux interprofessions d'identifier les impacts du changement climatique sur leur filière : baisse de production, déstabilisation des cycles de production, développement des bioagresseurs, délocalisation des productions, etc. Il est nécessaire d'identifier les leviers à activer pour y faire face. Nous avons donc demandé à la cellule de recherche et innovation technologique (RIT), qui regroupe l'Inrae, l'ACTA et l'APCA, de travailler sur une cartographie des leviers de réponse au changement climatique. Une centaine de leviers techniques d'adaptation au stress hydrique et thermique ont été identifiés à différentes échelles, qui ont été étudiés par des experts du réseau mixte technologique et climat.
La cartographie montre que le sol est central en matière d'adaptation de l'agriculture au changement climatique. Les leviers d'amélioration à activer sont la limitation du ruissellement, l'amélioration de la capacité de rétention du sol, de l'infiltration, de l'exploration racinaire par les plantes, de la tolérance au stress climatique, et la protection des plantes contre la chaleur.
À l'échelle de l'exploitation, il convient de choisir des espèces et variétés adaptées, d'adopter des stratégies d'esquive des stress dans les moments de culture (printemps ou plus tard en automne), d'adapter la taille et la forme des parcelles, de mobiliser les ressources en eau renouvelables, de piloter l'irrigation, d'assurer une bonne répartition de l'eau, de piloter l'alimentation du cheptel et d'utiliser des races et effectifs adaptés. À l'échelle de la parcelle, l'amélioration des propriétés du sol s'obtient par un apport de matière organique, la limitation du tassement, l'adaptation du travail du sol, l'optimisation de la conduite des cultures pérennes et des techniques de greffe, le paillage du sol, la mise en place d'infrastructures écologiques (arbres), l'entretien des talus, l'installation d'ombrières. Pour les animaux, on préconise la conception de bâtiments d'élevage pour s'adapter aux excès de chaleur et l'adaptation de l'abreuvement et de la production fourragère.
S'il existe de nombreux outils identifiés, la situation se pose de manière différente selon les régions et nécessite une approche fine au niveau des territoires. Les chambres régionales d'agriculture ont travaillé avec les acteurs des territoires des treize régions métropolitaines pour élaborer des diagnostics territoriaux préalables au lancement de plans d'adaptation climatique. Ceux-ci visent à trouver des solutions concrètes et opérationnelles pour que les agriculteurs réussissent leur transition vers l'agroécologie et pour augmenter leur résilience face au changement climatique.
Les diagnostics ont été conçus en observant les évolutions passées du climat, ainsi que les projections climatiques par des simulations par région et des observations sur des productions emblématiques de chaque région, dans l'objectif d'identifier des leviers d'action qui donneront lieu à des plans stratégiques.
Une charte a été signée entre les interprofessions agricoles, les chambres d'agriculture, les instituts de recherche et les deux ministres ayant organisé le Varenne. Il était surtout important de lancer une dynamique et de s'engager sur la suite. Les filières agricoles et les interprofessions se sont engagées à constituer des feuilles de route stratégiques d'ici 2022 et à mettre en oeuvre un plan d'action d'ici 2025. Cela sera suivi par FranceAgriMer. Les chambres d'agriculture s'engagent à mettre en oeuvre des plans stratégiques régionaux. Des plateformes de ressources seront ouvertes à tous les acteurs agricoles. Enfin, l'État s'est engagé à soutenir la recherche et l'innovation ainsi que l'équipement des agriculteurs.
Le Varenne de l'eau était donc un événement important qui a mobilisé de nombreux acteurs et sera une réussite s'il a une suite. L'adaptation au changement climatique est une nécessité qui s'impose à tous.